Jour 116 ~Bend

Zero Day Bend. Nous prenons le temps de nous préparer sans nous presser. La nuit a été tranquille. Régis, et Pierre sont déjà sur le chemin. Nous, nous filons sur Bend avec le Trail Angel Mike et Clément et Hélène au Cascade Lodge Hôtel ou nous avons réservé nos nuités. L’hôtel est sympa et le gérant plutôt cool. Nous arrivons trop tôt et les chambres ne sont pas prêtes. Lorsque celui_ci comprend que nous sommes Thru Hikers, il fait accélérer le nettoyage. Pour nous c’est parfait, mais ça l’est moins pour les femmes de ménage. L’impression est un peu mitigée. Il vaut être client que travailleur dans ce pays. Après avoir pris le temps de nous faire une beauté, nous consacrons notre journée aux courses. Nous commençons par aller chercher de nouvelles chaussures avec les deux Hélène. Après avoir été au REI, qui est LE magasin de sport, nous ne trouvons pas la marque qui convient. Tant pis, on achète le sac renforcé Ursac, qui permet de protéger sa nourriture des ours. Ils peuvent mâcher celui-ci, mais pas avaler le contenu. Il est obligatoire sur une des sections. En pratique ça prévient juste les ursidés de l’envie de recommencer, par contre pour le randonneur c’est purée garantie à l’intérieur ! Ça doit être un grand moment. On va éviter. Nous décidons ensuite d’aller au centre-ville. Une rapide course avec un Uber et nous voilà à pied d’œuvre. Nous sommes étonnés, c’est la première que nous traversons avec un vrai cœur de ville à l’européenne. C’est agréable et nous sentons poindre un peu de nostalgie. Nous trouvons les chaussures ad hoc. Parfait, nous voilà prêts pour les prochaines étapes.  Nous passons ensuite à la poste pour récupérer les cartons dans lesquels nous mettrons les ravitaillements. La dame au guichet nous demande d’emblée comment se déroule notre PCT. On doit vraiment être identifiable à quinze kilomètres. Nous enchaînons sur un étonnant moment de course au WallMart. Nous achetons pour 20 jours de nourriture que nous devrons répartir en 4 colis et envoyer dans l’état de Washington. Au passage en caisse, les gens doivent nous prendre pour de grands psychopathes. Il y a plus de 120 snickers, des pyramides de ramens, et beaucoup d’autres mets qui figurent au top de la junk food. C’est une expérience étrange. Nous avons du mal à savoir si nous sommes fiers de nous, ou complètement dépités.  Après avoir ramené tous ces différents achats dans notre chambre, nous attaquons la deuxième étape. Nous déconditionnons et réorganisons les barres, les petits déjeuners, les midis. Le volume sur le lit est impressionnant. Heureusement, les kilomètres et journées accumulés, on fait de nous de vrais professionnels nomades et on s’en sort bien. Nous finissons de répartir les vivres vers 23 h. Nous sommes bien fatigués, et sommes encore une fois surpris de voir que les vicissitudes de la civilisation sont toujours aussi usantes. Demain, il va juste nous rester la lessive et l’envoi des colis au matin. Ce devrait être bien moins compliqué.  Nous avons de pris contact avec un trail Angel pour le retour. Ce sera départ à 14 h. Nous découvrons que c’est l’épouse de Mike qui s’y colle. Décidément, ils arrivent encore à nous surprendre.  Keep going J117 One step back Oregon One step forward

Jour 115 ~Irish Lake à Elk Lake Resort

37 km 650 D+ 850 D- durée 11 h 00 Journée fatigante. Nous avons bien dormi, malgré un couchage tardif hier soir et une impression étrange de vivre dans un lieu où la vie est encore balbutiante. Il y a peu de bruits d’oiseaux. Le Mordor est juste à quelques mètres de nous et les animaux sont moins présents. Nous redémarrons comme de coutume aux aurores. Le déroulé du pas est plus laborieux ce matin. On sent que la veille, nous avons marché un marathon. Le rendement nous semble absent. En pratique, ce ne sera pas le cas, mais le ressenti est pénible. Nous avons l’impression de ne pas être efficaces.  Les paysages sont enfin redevenus visibles et beaux. Nous continuons à avancer sur la frontière virtuelle entre la nationale Deschutes Forest et Willamette National Forest, dans le parc des Three Sisters. Les lacs sont omniprésents, de toutes formes, de couleurs bleus, vertes, ou grises selon l’humeur changeante des nuages et des rayons du soleil. C’est une immense zone humide, et nous randonnons dans un labyrinthe aquatique, entrecoupés de forêts ou de praire. Nous ne savons plus qui est qui. Rifle, Brahma, Jezebel, Stormy, Blaze sont nos premiers plans d’eau croisés et nous n’avons marché qu’à peine 5 kilomètres. Rapidement nous arrêtons de compter et avançons. Ce soir nous aurons côtoyé plus de 30 lacs, soit un nombre hallucinant de presque un par kilomètre. Nous apercevons peu de sommets et les rares noms sur la carte sont des collines débonnaires. Les trois plus hauts, Irish, Little Roundtop et PackSaddle sont tout juste suffisant pour dépasser 600 mètres de dénivelé en fin de journée.  Par contre, tant d’eau vaut bien quelques moustiques. Les voilà de nouveau omniprésents. C’est même un miracle qu’ils ne soient pas plus nombreux. Cette étape juste au sortir de l’éclosion des larves doit être le lieu ou ne pas être à l’acmé de leurs faims. Nous avons aussi la chance de moins subir depuis que nous savons gérer. Nous commençons par nous protéger avec pantalon et manches longues. Puis, si les chaleurs sont incommodantes, nous mettons de l’insecticide DEET avant même d’offrir notre délicate peau aux vampires. C’est à ce prix que le port du short et tee-shirt est possible. Attendre est une erreur qui vous expose au choix de devenir fou ou vidé de votre sang, ou les deux. Nous avons aussi appris de la nature qui nous entoure. Dès que le soleil est au zénith, les moustiques se cachent. Nous prenons ainsi nos pauses et collation pendant les moments de calme, à partir de 11 h. Nous acceptons de plus, les rares piqûres et ne pas se gratter est une qualité que nous avons acquise. . En fin de journée nous rejoignons le site d’Elk Lake Resort après une descente rapide de 700 mètres. Nous sommes projetés dans un maelstrom de touristes et le choc des cultures et de civilisation fait mal aux yeux, au moral et au cœur. Nous avons l’impression de nous plonger dans une masse humaine clonée, sans âme, insipide. Imaginez le contraste de ces hikers fatigués, puants, dans une unique file pour aller au restaurant au côté d’hommes, torses nus, body-buildés, sur d’eux ou de femmes aux formes trop parfaites pour être honnêtes. La caricature d’une Amérique californienne et healthy brûle la rétine. Mais c’est aussi cela la découverte d’une culture, accepter et ne pas trop juger l’autre même si notre vie Into The Wild nous rend beaucoup circonspecte que de coutume. Ce soir nous sommes bien épuisés. Nous comprenons rapidement, à 18 h, que nous avons complètement oublié de nous hydrater correctement. Nous n’avons bu que 1,5 l chacun par 30 °C. Nous sommes des vrais boulets. Heureusement que nous sommes maintenant acclimatés. Cette erreur aurait pu nous coûter cher.  Nous installons nos tentes à plusieurs dans un emplacement réservé aux PCTIstes. Nous sommes un petit groupe de Français et l’ambiance est sympa. Régis, le plus français des Belges, Pierre, Hélène (l’autre), Clément, Hélène et moi-même anticipons la suite. Nous serons quatre à aller sur Bend demain pour un zero day préparations du passage de l’état de Washington. Un Trail Angel, contacté sur Facebook, viendra nous chercher vers 9 h. Les deux autres, à savoir Régis et Pierre continue ensemble vers le Nord et ferons un passage plus tard pour les colis Sur le front des incendies, le risque est à son niveau maximal. Selon les services météorologiques de l’état, en raison des températures élevées, de l’importante sécheresse, tout déclenchement, soit naturelles, par les orages, soit du fait de l’activité humaine, donne lieu à des feux difficiles à contrôler et maîtriser. Nous croisons les doigts pour la suite.  Keep Going J 116 J115 Incroyable rayon de soleil levant sur Riffle Lake J115 S Lake J115 Le PCT dans Deschutes National Forest J115 Les couleurs étonnantes des lacs de l’Oregon J115 Island Lake J115 Entre destruction et forêt intact, le feu de Pete Lake de 2023 J115 La magnifique prairie de Reserve Meadow One step back Oregon One step forward

Jour 114 ~Shelter Cove Resort à Irish Lake

42 km 1100 D+ 900 D- durée 13 h 30 Apocalyptique. La journée a été marquée du sceau de l’enfer. Nous avons traversé un feu de 2022, le Cedar Creek Fire et c’est impressionnant. Ce matin, nous démarrons bille en tête. Le repos d’hier nous a reboosté et nous attaquons notre première montée à presque 5 km/h sur plus de 13 kilomètres. La randonnée nous réconcilie avec l’Oregon, les lacs sont omniprésents, la forêt est intacte, pas trop haute, clairsemée, mais suffisamment dense pour protéger du soleil. Bref le top. Sous Pulpit Rock, les trois lacs Rosary sont justes parfaits. Au vingtième kilomètre nous faisons une entorse au PCT et allons jusqu’au magnifique lac de Bobby. Nous sommes plusieurs et nous passons un agréable moment. Pierre qui nous accompagne voit arriver Hélène, une Française qui a traversé la Sierra avec lui. C’est cool et il apprécie. Elle a été rejointe par son compagnon, qui randonne l’Oregon avec elle.  Nous repartons et avançons vite. Le soleil est devenu supportable et une baisse des températures est annoncée. Nous devrions passer en dessous des 30°. Cela est vraiment sympa.  Nous avons appris qu’un trail magic de grande taille est prévu ce jour au nord du lac Charlton. Cela nous amènera au kilomètre 33, nous verrons si on campe la ou non. Effectivement, c’est le cas, sauf que nous sommes plus de 25. Nous prenons le temps de boire et de manger des chips. Après discussion avec Hélène, on est d’accord pour ne pas nous arrêter. Trop de monde et surtout, le Trail Angel préparera le repas du soir que vers 21 h. C’est trop tard pour nous.  Nous voilà repartis. À peine 500 mètres après notre départ, c’est le choc nous passons d’une forêt indemne à une zone intégralement rasée. Nous entrons dans un désert de dix kilomètres de cendre. Les arbres ont littéralement explosé, et ont été brûlés jusqu’à la souche. La terre est stérilisée pour probablement des années et seules quelques rares herbes poussent tant bien que mal. Des blocs de granit sont fendus sous l’intensité de la chaleur. Quel que soit l’endroit où le regard se porte, les collines proches ou lointaines sont nues. Le mega de feu de 2022 a duré 3 mois et consumé 45 500 hectares. L’apparition de pyrocumulus a localement modifié la météorologie, générant ses éclairs et surtout créant ses propres vents au sol, rendant celui-ci imprévisible. Effectivement ce que nous contemplons défie toute logique. Sur le chemin, une fine couche de poussière de cendre de 5 cm vole à chacun de nos pas. Au loin, vers l’ouest, vers le lac Waldo, et Taylor Butte c’est une sombre terre noire qui se prolonge jusqu’à l’horizon. Le soleil rasant ajoute à l’ambiance de fin du monde. C’est la zone la plus détruite que nous ayons traversée. Cela a dû être l’enfer pour toute vie au moment du feu. Théoriquement, nous devrions camper au milieu de cette dévastation. Après courte concertation, nous décidons de continuer, pour une étape à plus de 40 kilomètres. Visiblement, il existe un campsite intact au niveau d’Irish Lake.  Banco, c’est le cas, et il n’y a qu’une seule tente. Parfait, nous montons rapidement la notre et attaquons notre repas du soir à la frontale. Nous sommes rejoints par 3 autres randonneurs bien secoués eux aussi par leur journée. Puis, nous entendons Régis et Pierre, ils arrivent encore plus tard et installent leurs abris à la nuit. Avant de dormir, nous faisons le point avec Hélène. Il va falloir surveiller les incendies, pour composer avec les fumées omniprésentes. Le regard est rivé sur l’application Watch Duty. Clairement l’Oregon est la proie des flammes. Pas cool pour l’avenir. Nous lisons que les feux sont en hausse de 540 % en ce début juillet et que le gouverneur a déclaré l’état d’urgence dans certains comtés.  Demain nous devrions arriver à Elk Lake Resort d’où nous poursuivrons sur la ville de Bend. Keep Going  J 115 J114 Le lac Lower Rosary J114 Pulpit Rock J114 Les 3 lacs Rosary, Odell et Crescent Lake au sud J114 L’immense lac d’Odell J114 Au loin le Mt Thielsen J114 Les deux Hélènes, Régis, Pierre et Clément J114 Trail Magic au lac Charlton J114 Une French Team improvisée J114 Le PCT au sortir de Willamette National Forest J114 Charlton Butte rasé par le feu de 2022 J114 Hélène sur le PCT J114 La forêt est de plus en plus abimée J114 Cedar Creek Fire J114 Désert de cendre, à parte de vue J114 Les conséquences d’un mégafeu. Plus de vie J114 Un coucher de soleil en enfer One step back Oregon One step forward

Jour 113 ~Shelter Cove Resort

Shelter Cove Resort. Zero Day Nous n’avions pas prévu ce jour de repos. Il sera le bienvenu. Ne pas avoir à se lever tôt, ne pas devoir ranger ou porter son sac à dos est un luxe sur le chemin. Nous l’apprécions à sa juste valeur. Nous en profitons pour organiser avec Régis et un autre randonneur français, Pierre de Lyon, le passage de l’état de Washington. Nous savons que les ravitaillements sont compliqués et qu’il est préférable d’envoyer de la nourriture. Nous avions prévu de faire le planning plus tard, mais comme nous sommes off, nous faisons les opportunistes. La préparation est complexe et le calcul de la durée des sections peu aisé. Cela nécessite d’être rigoureux, sous peine de mise en difficulté. On arrive tous à une organisation similaire. Ce sera 5 boîtes. Nous irons faire les achats à la prochaine sortie dans la ville de Bend. Elle est idéalement située, une dizaine de jours avant le premier colis à récupérer.  La journée est tranquille. Finalement nous sommes plutôt contents de ce zero day extrêmement important pris pour anticiper la suite. Pendant ce temps, les feux environnants poursuivent leur progression. Nous passons le séjour à Shelter Cove dans les fumées. C’est moyen pour les poumons, mais pas catastrophique dans la mesure où nous ne restons pas trop longtemps. Pour les locaux c’est une autre affaire. Nous continuons à voir arriver des randonneurs, qui sont aussi dépités que nous la veille, de la fermeture de la section. Parmi eux, nous retrouvons Yéti et Spretzels que nous avions croisé il y a deux jours. Ils ont essayé de passer en contournant le Trail Fire et l’ensemble des multiples incendies maintenant appelé Diamond Complex Fire. Ils ont constaté que c’est impossible du fait des fumées et ils ont dû se résigner à faire comme nous. Le nombre de foyers qui ont démarré pendant l’orage de la nuit du 16 au 17 juillet dans la forêt UmpQua nationale Forest est de 33. Ils brûleront plus de 5000 hectares jusqu’en septembre.  Nous faisons une sieste et mangeons au restaurant du Resort. Le repas n’a rien d’exceptionnel, mais est parfaitement adapté aux randonneurs, donc on apprécie.  Demain nous partons pour 2 jours direction Elk Resort puis nous irons à la ville de Bend où nous ferons les achats et les colis pour le passage de l’état de Washington. Go to Canada. J114 A7407448C A7407464C A7407465C A7407462C A7407468_DxO A7407461C A7407457_DxO One step back Oregon One step forward

Jour 112 ~Lightning Spring Backcountry Campsite à Shelter Cove resort

13 km 350 D+ 450D- durée 3 h 00 de marche Journée… singulière. Le programme était théoriquement simple. Finir le  Rim Trail de Crater Lake, puis faire du stop jusqu’à la ville de Chemult, pour faire la lessive, prendre une douche, et procéder au ravitaillement. Ensuite, il était prévu que nous revenions sur le PCT et allions sur les contreforts du magnifique Mt Thielsen et de l’Umpqua National Forest que nous avons aperçu hier. Nous nous levons et déjeunons rapidement. Régis est déjà parti quand nous quittons les lieux. Notre voisine sort juste de sa tente et nous lui disons au revoir. La randonnée au lever de soleil sur le bord du volcan est magique. Nous sommes seuls et les couleurs sont encore plus impressionnantes que la veille. Sous Watchman Peak, un névé nous fait répéter nos gammes de parfait Thru hiker. Après quelques glissades sans danger, nous retrouvons une courte remontée et arrivons à un parking qui marque la fin du Rim Trail pour les PCTistes. Vers 7 h, Hélène remarque sur notre gauche, un nuage en contre bas dans la vallée où passe le PCT ! À peine 30 min plus tard, une colonne de fumée de gros calibre se dessine à moins de 5 kilomètres de nous. Moins de 10 minutes après, un hélicoptère, puis un avion de reconnaissance nous survol. Ça commence à être peu sympathique cette histoire. Nous vérifions sur le site Watch Duty si un feu est actif dans le secteur. Pour l’instant rien n’est signalé. On verra bien. Dans moins de quatre kilomètres, nous serons de nouveau sur notre fil d’Arianne vers le nord. Alors on fonce. En retrouvant le PCT, on prend le temps de re contrôler Watch App et découvrons qu’un nouvel incendie démarre à moins de 5 miles de nous, le Trail Fire. Ce sera le début d’un beau bordel. Au croisement du PCT et de la route Highway Crater Lake North, nous réussissons à faire un stop incroyable. La conductrice de la voiture qui s’arrête ne nous est pas inconnue. C’est notre voisine du camping du soir qui nous a reconnus. Merci Krista. Elle nous laisse au niveau de l’highway 138 et continue vers l’ouest. Nous attendons une vingtaine de minutes, puis montons dans un énorme pick up. C’est une famille hondurienne qui prend le relais et nous amène directement à Chemult. La jeune femme est super fière de rencontrer ses deux premiers Thru Hikers. Nous avons l’impression d’être des héros et elle va noyer Hélène sous un flot ininterrompu de questions. C’est vraiment sympa ces moments simples où les gens veulent absolument vous aider. En ville, après avoir pris le temps d’une douche dans un camping hors d’âge, et fait le ravitaillement, nous hésitons à retourner sur le PCT. L’incendie est certes de petite taille, mais il est très proche, à moins de 2 kilomètres de la piste. De plus, les vents poussent les fumées sur celui-ci. Nous décidons de temporiser et restons manger à midi à Chemult. Vers 14 h après un énième contrôle sur le site des pompiers nous constatons que de 1 âcre brûlé on est passé à… 100 acres, et comme le PCT est enfumé, on préfère être prudent.  À 16 h, nous apprenons une fermeture et une évacuation immédiate de niveau 3 du PCT. Les SMS comminatoires écrits en rouge ne sont pas rassurants, et les téléphones se mettent à vibrer. Pour les PCTistes sur le chemin, cela signifie demi-tour en urgence. Régis en fera les frais. Pour les autres « hikers », ce sera obligation à un rythme d’avancer d’enfer en zone sécurisée. Certains passeront à moins de 500 m du feu ! Nous avons fait le bon choix. Nous redémarrons le stop. Après moins de 10 minutes d’attente, nous bénéficions du transport d’un Trail Angel, qui va faire des navettes pour sortir les PCTistes du secteur de Crater Lake. Les locaux évacueront plus de 100 personnes en trois jours. Il nous dépose à la ville de Crescent. Nous recommençons le stop et voyons défiler les camions incendies. On sent que la région est en situation de crise. Après plusieurs échecs, un véhicule fait demi-tour devant nous. C’est un coupé sport, improbable. On pense d’abord à une blague, mais non. Une jeune femme aux cheveux roses aux tatouages en folies descend. Elle nous dit que nous avons de bonnes allures et que du coup elle veut nous aider. Commence alors un Tetris bien laborieux, et, par miracle, nous réussissons tous à rentrer dans le véhicule le plus kitch que nous ayons vu. Dorures, paillettes, faux diamants, sièges en cuir noir avec surpiqûre rouge vif, et même une tête de Sully qui accompagne Hélène pendant tout le voyage. Nous sommes avec un couple d’une gentillesse incroyable, mais d’une ferveur républicaine exacerbée. La conductrice découvre l’aventure d’Hélène et décide qu’elle doit lui permettre de se protéger. Hélène voit alors arriver dans ses mains un énorme couteau, et aura droit à une séance de self défense pour tuer les ours ! Ce sera un des moments le plus fous du chemin. Le couple nous dépose à Shelter Cove. D’autres hikers sont présents. Nous sommes les premiers du groupe Shasta à débarquer. D’autres nous succéderont pendant les heures qui suivent, dont Régis qui nous rejoint presque 6 heures après. Sur place, en discutant avec les randonneurs attablés, nous découvrons que trois départs de feu juste avant Shelter Cove sont signalés. Un des sites de campement du PCT a été évacué cette nuit en catastrophe en pick-up par les locaux, avec un front de flamme à moins de 200 mètres des tentes. L’ambiance est bien tendue et les hikers qui ont été secourus sont encore bien secoués ! Le cumul de ces fermetures de piste nous amène à sauter l’équivalent de 2 jours de marche. Pénible ! Nous décidons de prendre un zero day le lendemain, histoire de faire le point et de nous reposer de la fatigue psychique accumulée.  Go to North J113 J112 Lever de soleil sur Crater Lake J112 Le Rim Trail de Crater

Jour 111 ~Oregon Desert à Lightning Spring Backcountry Campsite

 24 Km 650 D+ 750D- durée 10 h 00 Crater Lake. Enfin ! Nous démarrons aux aurores pour une arrivée au village de Mazama que l’on espère vers 11 h 30. Il est situé au pied du gigantesque volcan qu’est Crater Lake. Celui-ci est difficile à appréhender tellement il est imposant, dix sur huit kilomètres pour une profondeur de presque 600 mètres. C’est juste stratosphérique. Ce qui est sur aussi, c’est que c’est une destination touristique majeure des USA. Pour nous, c’est une étape obligée du chemin, même si officiellement le PCT ne passe par sur le trail qui fait le tour de la caldeira. Il reste sagement dans la plaine 300 mètres en dessous de ce qui est une des plus belles vues de l’aventure. La sale blague. Nous sommes toujours étonné de cette philosophie discutable de s’éloigner des sites touristiques en détournant les randonneurs. C’est une hérésie invraisemblable, comme si, 600 hikers par an pouvaient abîmer un lieu ou se presse plus de 400 000 personnes par an. En pratique 100 % des PCTistes font le passage par le Rim Trail. Avant d’arriver à la route qui croise le PCT, nous avons le privilège de marcher dans ce qui a été l’enfer d’un ancien incendie. Le sol est complètement stérilisé, chaotique, et cela une ambiance de fin du monde désagréable. C’est moyen pour rester motiver. Heureusement, les paysages d’arrière-plans sont plus engageants et surtout la Caldera de Crater Lake est en vue. On ne réfléchit plus, on fonce. Hélène au passage d’un widow maker réussi l’exploit de perdre l’équilibre. De loin, cela ressemble à un énorme champignon de cendres et de suie qui brutalement se réveille. À 50 mètres, elle est devenue invisible dans un superbe nuage poussiéreux. Je ne peux m’empêcher de me moquer, surtout qu’elle ne s’est pas blessée. Si avant la chute elle était sale, après elle est déguisée en tronc d’arbre mort, couverte de noir sur les jambes et intégralement grise. La classe.  Au kilomètre douze, nous croisons le panneau qui marque officiellement notre entrée dans Crater Lake National Park. Le moment est sympa, et important. Nous arrivons vers midi au restaurant Annie Creek. L’objectif est triple, manger, voire si nous pouvons profiter une douche et obtenir les informations pour aller chercher le permis pour dormir ce soir au bord du cratère. Deux seront faits aisément avant 15 h, simples et efficaces. Par contre, nous apprenons que le camping de Mazama n’a pas d’eau chaude. Nous croisons Régis, il reste pour se laver, il se sent vraiment trop sale. Il nous rejoindra au couchage tantôt. Tant pis, on continue, et allons au poste des rangers pour être en règle. Deux stops de véhicules sont nécessaires, mais cela se fait sans difficulté, le lieu étant archi touristique, nous attendons à peine 10 min à chaque fois. Le soir nous découvrirons que nombres hikers ne font pas l’effort de se signaler. On n’a pas bien réussi à savoir ce qu’il en était réellement. Dans le doute on a préféré rester rigoureux.  Nous arrivons en milieu d’après-midi, nous sommes déposés au parking Rim Village Café, et faisons les badauds en faisant le tour de la Caldera par l’ouest. Le site est extraordinaire. Le lac est immense et la présence d’une deuxième cheminée volcanique, sous la forme d’une île, Wizard Island, est absolument magique. Les couleurs, comme pour beaucoup de volcans, alternent les rouges, noirs, jaunes, ocres, le tout étant renforcé par le contraste des flots d’un bleu profond. C’est plein de touristes, mais l’espace est tellement grand que cela n’est pas pesant. Quelques névés sont encore présents, mais sont à distance du trail. Nous sommes enfin au campsite. Il est parfait, les emplacements sont immenses, l’eau est abondante et claire. Les moustiques sont absents. Nous sommes installées à côté d’une Day Hiker, impressionnée de notre périple. Elle finit son séjour et nous donne de la nourriture qu’il lui reste. Sympa.   Nous avons eu droit à une étape d’été magnifique sur ce PCT, et le moral est remonté au pic. Arriver en 5 jours a été laborieux, mais renforce d’autant la satisfaction d’être enfin ici. Demain ce sera une journée ravitaillement. Il semble que le passage par la ville de Chelmut est compliqué. On verra bien. Keep going J112 J111 Hélène dans l’enfer de l’Oregon J111 La désolation du Blanket Creek Fire J111 Un PCT chaotique J111 Les incroyables couleurs du PCT J111 Union Peak au loin J111 Sur la bordure du Blanket Creek Fire J111 des hikers heureux J111 L’entrée du Parc de Crater Lake J111 Enfin, Crater Lake J111 Hélène devant Crater Lake J111 Le site est extraordinaire J111 Le bleu du lac est grandiose J111 Un touriste à gauche pour avoir une idée de la taille du lieu J111 Les vues du Rim Trail J111 Wizard Island One step back Oregon One step forward

Jour 110 ~Center Lake à Oregon Desert

37 km 900D+ 900D- durée 12 h 30  On poursuit notre progression au sein des forêts de l’Oregon. Nous avons l’impression d’une immense fuite en avant vers le Nord. Cela donne le vertige. Nous n’avons plus quitté les forêts depuis Seiad. Cela fait presque une semaine que c’est un long tunnel de verdure. Heureusement ce jour, les collines sont un peu hautes et au passage des cols sans nom ou le long des crêtes nous avons des vues sur les paysages monumentaux de l’Oregon. La densité des arbres est moindre et des clairières, plus présentes, permettent d’apprécier les couleurs du levant.  Après un déjeuner pris en présence de quelques moustiques et après une nuit moins reposante, un cerf a fait preuve d’indiscrétion en grattant autour des tentes, nous sommes de nouveau au boulot ! La marche au matin est moins agréable. En fait, elle va même devenir des plus insupportables. Nous avons droit au pire du PCT. À tous points de vue, c’est une association de malfaiteurs composée d’arbres morts et d’anophèles. Pour commencer une longue succession de widows makers va nous ralentir et être franchement usante. Le premier tronc passé, on fait bonne figure, après plus de cent répétitions, on frôle la folie. Le chemin n’est plus entretenu. Nous savons bien que la forêt primaire est vivante, et ces arbres au sol sont normaux. Sauf que cela la progression complexe et fatigante. Ensuite les moustiques sont de retour. Ils sont assoiffés de sang, innombrables, tous plus déterminés les uns que les autres à vous coller une anémie. Trois heures durant cela a été l’enfer. Du coup, Hélène finit par se couvrir de DEET, avec Régis. Je les entends à plusieurs reprises hurler de rage après ces indésirables, mais ils s’obstinent à rester en short et tee-shirt, du fait de la chaleur. Moi, j’ai choisi de randonner avec mes vêtements de pluie. C’est l’étuve, mais au moins je ne deviens pas fou. La protection mécanique est la solution. Sauf qu’il fait encore plus chaud. C’est éreintant pour le moral. La question de savoir ce que l’on fait là tourne en boucle. La motivation pour poursuivre dans ces conditions est difficile à trouver. Nous croisons un randonneur qui vit un épisode toujours plus compliqué. La bretelle de son sac à dos est cassée et non réparable. Il cumule en quelques minutes, chaleur, moustiques et portage douloureux. Comme quoi, cela peut encore être pire sur ce PCT. Heureusement, au moment même où les piqûres virent à l’obsession, succède un après-midi d’une tout autre nature. Les vampires se calment, et les paysages offrent enfin des vues gigantesques et apaisantes, dômes volcaniques dans le lointain, sentier en balcon au-dessus de lacs de montagne. Il n’en faut pas plus pour revivre. À partir de Luther mountain, nous avançons sur une crête rocheuse et recommençons à croiser des forêts brûlées. Les panoramas sont plus visibles, et nous apprécions, même si c’est au prix d’arbres détruits. Nous passons Shall Butt à 2200 mètres d’altitude, puis Lucifer Peak, et arrivons à un col sans nom entre Devil’s peak et Lee Peak. Dans le cirque, en face Nord, nous avons de nouveau un névé. Incroyable, nous sommes mi-juillet et, il encore suffisant important pour vous envoyer plus bas. Régis finira d’ailleurs sur les fesses. Nous franchissons l’obstacle sans difficulté et moins de 10 minutes après sommes sur la terre ferme. La descente de plus de 500 mètres est magnifique. À mi-distance nous croisons une source abondante. Nous nous posons, faisons ravitaillement et pause. Nous sommes rejoints par un couple de Triple Crowner, Yéti et Spetzel en voyage de noce sur le PCT. Nous les avions rencontrés au début de la Sierra, et les pensions loin devant. En fait, ils ont fait une césure famille d’une semaine. Ce sont des machines et marche entre 40 et 50 kilomètres par jour. Respect ! En fin d’après-midi, changement d’ambiance, on entre dans une zone appelée le désert de l’Oregon. C’est un no man’s land où tout a brûlé avec l’incendie du Blanket Creek fire de 2017. Les arbres en sont réduits à de fines allumettes, noircis et cassés à différentes hauteurs. L’atmosphère est réellement particulière. Nous sommes entre admiration des paysages visibles et désespérance de tout ce gâchis. Le biotope est irrémédiablement détruit. D’aucuns ont beau nous expliquer que c’est le cycle naturel des forêts, c’est faire preuve d’un optimisme aveugle. Ces forêts ne repousseront plus. L’augmentation des températures moyennes, du fait de la course industrielle irraisonnée et d’un mode de vie suicidaire, condamne ces lieux et ce sont de futurs déserts que nous contemplons.  Au trente-cinquième nous trouvons, par hasard, sur le bord du chemin un névé en train de fondre. Il offre une possibilité de ravitaillement des plus étonnantes. Nous avons l’impression d’être des survivants d’une époque post apocalyptique, à filtrer cette eau qui descend en une fine rigole dans des cendres noires. Nous évitons ainsi une sortie vers Jack Spring à l’ouest.  Nous marchons encore deux kilomètres, et entrons dans une petite forêt intacte dans la zone brûlée ou nous pourrons monter la tente. Régis décide de continuer cinq kilomètres. Il veut arriver tôt à Crater Lake tantôt. Nous installons notre couchage et serons seuls. Demain, nous serons sur l’un des lieux emblématiques du PCT. Cool.  Keep Going J111 J110 Enfin des beaux paysages J110 le sud Oregon J110 L’immense lac Upper Klamath J110 Le mont Shasta, seigneur des lieux J110 On retrouve les forêts brulées J110 Sur les crêtes de Shale Butt J110 Wind and Martin Lake J110 Shale Butt J110 Les vues réapparaissent J110 Les pentes sous Lucifer Peak J110 En toute vers Devil’s Peak J110 Le début du désert de l’Oregon J110 2017, séquelles du Blanket Creek Fire J110 Le désert de l’Oregon avant l’incendie J110 Le camp site du soir One step back Oregon One step forward

Jour 109 ~South Brown Mountain Shelter à Center Lake

38 km 900D+ 700D- durée 13 h 30 Journée bien plus agréable que les précédentes. Les températures deviennent normales… non, supportables. Dès le matin, le ciel est couvert et nous sommes protégés pour passer les sections exposées au soleil. Nous allons marcher pendant plus de 12 kilomètres dans les pentes de l’immense coulée de lave issue du volcan Brown. Nous démarrons parmi les premiers ce matin et retrouvons rapidement le trail. Nous poursuivons en passant de Winema National Forest à Rogue River national Forest et restons à l’altitude de 1700 m en une longue courbe qui contourne le cône caractéristique par l’ouest. Nous admirons les compositions de la végétation, qui arrive à pousser entre les roches basaltiques noires, et le PCT, recouvert de pouzzolane rouge pour faciliter la progression. Si nous avions dû marcher sur la lave noire, nous aurions eu nos chaussures rapidement usées. La pierre est d’une abrasivité effrayante, faite de micro pics tranchants. Le lieu est extraordinaire. Les couleurs sont bien différentes des jours passés et la monotonie diminue. Enfin ! Cela réconcilie avec un début d’Oregon particulièrement ennuyeux jusqu’à présent. Bon, après il ne faut pas se voiler la face, on est quand même en forêt sur au moins 80 % du temps. Au douzième kilomètre, nous rencontrons une suissesse, Athéna, qui avance doucement, elle souffre d’une tendinite du muscle Piriforme qui lui provoque des sciatalgies importantes. Nous prenons tous ensemble la pause et lui souhaitons bon courage en redémarrant.  Au seizième kilomètre, en croisant la route OR 140 Falls Hwgw, nous filons en stop vers le lac Fish, pour profiter d’une courte échappée hors du Wild. Il n’y a rien d’exceptionnel au Fish Lake Resort, mais, manger assis à une table au milieu de la civilisation est une bouffée d’air appréciée. Les forêts sont pesantes. Le très classique combo hamburger/milk shake est de rigueur, ceux-ci n’ont rien d’extraordinaire, mais toute calorie est bonne à ingérer.  Nous repartons en début d’après-midi en montée sur plus de 400 mètres dans les pentes du volcan Mc Loughlin et Fourmile Lake. Nous nous replongeons entre les arbres. Heureusement, nous prenons un peu d’altitude et avons de temps en temps des vues qui permettent de se rendre compte que les paysages changent.  Nous allons devoir avancer jusqu’au campement sous les futaies sur plus de vingt kilomètres, et cela va être infiniment long. Ces forêts sont justes hors normes pour des Européens. Aux kilomètres trente-quatre, nous arrivons à Christi’s Spring. La source est abondante. Les moustiques sont d’une densité monstrueuse et c’est une vraie épreuve qui donne envie de partir en courant. Ils attaquent en meutes. L’avantage c’est de pouvoir les éliminer par poignées, le drame c’est qu’ils sont en nombres infinis ! Nous espérerions aussi dormir au campsite à côté. Ce ne sera pas le cas. Il y a foule et il n’y a plus d’emplacement libre. Tant pis, nous repartons pour trois kilomètres de mieux et allons à la jonction Red Lake Trail. Nous avons lu sur le topo qu’en remontant vers Center Lake à l’est, il y aurait des places. C’est le bon choix et nous sommes seuls. Ce soir, nous dormons dans un endroit plutôt sympathique, à l’écart de la piste. La forêt est plus aérée et nous avons la visite de cerfs qui sont réellement peu farouches. Ils tournent autour de nous à moins de 10 m. L’autre point positif, non magique, il n’y a PLUS de moustiques. Nous n’avons pas de regret de ne pas être restés au camp précédent qui aurait été infernal.  Nous pouvons aussi sans difficulté aller faire le ravitaillement en eau au lac, en marchant 5 min, avec une belle vue. Alors certes, nous avons fait une très longue journée, plus de 13 h, avec la pause restaurant pour venir jusqu’ici, mais c’est sans remords. Demain, nous aurons une étape complexe en perspective, il y a une distance importante sans source. Il va falloir porter lourd et être économe. Ce serait agréable que nous ayons les mêmes conditions de randonnée. Nous verrons bien. Keep Going J110 J109 Au sortir de Winema National Forest J109 Les pentes du Volcan Brown J109 L’incroyable section rouge du PCT J108 Hélène sur le chemin de pouzzolane J109 KLa rencontre avec Athéna J109 Coulée de lave du Mont Brown J109 Au loin, une PCTiste J109 Le mont Mc Loughlin J109 La longue portion du mont Brown J109 Fourmile Lake J109 Environnement volcanique J109 Le campsite du soir, en forêt vers Center Lake One step back Oregon One step forward

Jour 108 ~Hyatt Lake Recreation Area à South Brown Mountain Shelter

34 km 900 D+ 850 D- Durée 10 h 30 Bis repetita. Nous savons que nous allons avoir une journée identique à la veille. Il y a peu de gros dénivelés, même si nous aurons 500 mètres en montée dans l’après-midi. Le chemin serpente sous des futaies le long des collines du sud de l’Oregon. Il y a toujours aussi peu de vue. Les forêts sont majestueuses, certes, mais cela compense peu et une certaine lassitude s’installe. Les pins sont omniprésents et cachent les rares panoramas sympathiques qui sont distillés au compte-gouttes. On a l’impression que le PCT a été tracé pour que l’on ne puisse rien découvrir. Frustrant. On passe à moins de 50 m de lacs… que l’on devine plus qu’on ne les aperçoit. Ainsi, après être allé au matin faire notre ravitaillement au Wild Cat camping Area, nous longeons l’immense lac Howard Prairie du kilomètre 12 au 14. Incroyable, on l’imagine de temps en temps au travers des arbres, mais on s’obstine à marcher désespérément derrière la route Willow Creek Road à distance. Bref, une première partie de l’Oregon qui n’incite pas à l’enthousiasme. Il faut dire que la comparaison avec certains paysages rencontrés sur le PCT, et en particulier ceux de la Sierra Nevada, n’est pas à l’avantage de ce que nous découvrons. La bonne nouvelle est que nous sommes rodés à la gestion des points d’eau, qui, même si elle reste critique, ne nous pose pas de difficulté. La dette hydrique peut être catastrophique ici aussi, malgré la présence de l’ombre des arbres. La chaleur oblige à s’hydrater, au moins un 1 litre tous les 5 km. Avec des distances de 5 à 15 km entre les fontaines, nous calculons à chaque ravitaillement ce dont nous avons besoin. Nous nous forçons également à appliquer le conseil d’un ancien hiker, toujours arriver sans eau à la source et bien boire ce qui reste dans les bouteilles. La technique est redoutable, mais il faut le faire avec parcimonie, ni trop tôt ni trop tard. Du lac Howard Prairie, nous attaquons la longue montée du jour, sur presque 10 kilomètres le long de Brush mountain, puis vers Old Baldy. Dans la descente de celui-ci, nous croisons une route, la cr 533, perdu au milieu de nulle part. Nous quittons celle-ci et replongeons dans l’enfer vert. C’est effrayant, après chaque arbre, il y a encore… des arbres. Sérieuses, jamais elles ne s’arrêtent ces forêts ! L’autre fait du jour, c’est la chance d’être dans une bulle qui nous préserve des feux. Sur l’application Watch Duty, il y des incendies, à l’est, l’ouest et au sud. Rien devant nous, une aubaine qui nous permet d’avancer à l’abri des fumées. Pour la montée vers le nord il n’y a actuellement pas de points rouges sur le tracé. Alors, on fonce. Nous arrivons plus tôt que d’habitude, en ayant marché deux heures de moins pour la même distance, à South Brown Mountain Shelter. Le refuge est bien vieux, et n’incite guère au couchage. De nombreux hikers sont déjà là. La présence d’un puits artésien que nous activons en faisons de grands mouvements de ballants bras sur une antique pièce métallique n’y est probablement pas pour rien. Nous en profiterons, comme d’autres pour faire une toilette bien méritée. Demain on file vers des zones plus exposées et hors forêt, sur des flancs volcaniques sur 15 km environ. Nous nous lèverons tôt pour passer cette section avant les grosses chaleurs. Normalement les températures devraient aussi baisser, aux alentours de 37 °C. On verra. Go To Canada J 109 J108 Le PCT en forêt, longtemps J108 Un pissenlit, sauf qu’il fait 20 cm de diamètre ! J108 L’entretien du PCT est impressionant J108 On a croisé Polnareff ! One step back Oregon One step forward

Jour 107 ~Ashland à Hyatt Lake Recreation Area

31 Km 900 D+ 900D- durée 11 h 30 Journée compliquée. Nous avons bien dormi au camping de Jackson Wellsprings. Malgré une population bien différente, notamment un nombre important de sans domiciles, entre Hobos et Americans Nightmare qui se sont levé tôt pour ne pas devoir s’acquitter de la nuitée. La bonne chose, c’est qu’ils nous ont communiqué le code des douches et des toilettes, qui sont payantes. Par contre, nous apprécions peu l’odeur d’hydrogène sulfuré qui s’échappe des eaux chaudes. Elles sont thermales et cela sent sévèrement l’œuf pourri ! Le chauffeur Uber est à l’heure, et nous bénéficions d’un transport sympathique. Il efficace, mais peu loquace. Régis, Hélène et moi démarrons sur le Trail à 7 h 30, après une localisation sans difficulté du PCT, malgré une adresse imprécise communiquée au conducteur. Nous quittons la route 273, et entrons immédiatement dans le vif du sujet. Nous allons côtoyer les Siskiyou mountains pendant toute la journée. Il fait une chaleur moite plus pénible que celles des étapes passées, et sommes assommés par l’absence d’air, qui empêche toute progression efficace. Heureusement, le chemin est bien tracé, alternance de petites montées et descentes. Nous sommes malgré tout obligés de ralentir, et de reprendre la même stratégie que précédemment. Dommage, nous espérions avancer plus rapidement. Depuis des semaines, un nombre important de hikers nous vendent du rêve. Vous allez voir, l’Oregon c’est plat. Le PCT va être facile et vous allez marcher vite. Cette blague ! Nous avons connu, sur le nord Californie, des journées plus roulantes. Et ce d’autant plus, qu’il y avait moins d’arbres en travers du chemin, qui semble moins bien entretenu. Nous croisons le sommet basaltique Pilot Rock. Les traits verticaux noirs offrent une vision tout en contraste avec le mont Shasta, qui loin au Sud émerge des volutes des fumées du Sheryl Fire. Le panorama est magnifique et nous prenons le temps, malgré la chaleur, de contempler l’immense vue devant nous. Nous regagnons le chemin et suivons une crête boisée, qui dessine de Porcupine mountain, en passant par Little pilot Peak, Hobart Peak, jusqu’à Green Springs mountain un gigantesque arc de cercle vers le nord.  Le poids des sacs nous pénalise. Ce n’est pas simple et les épaules recommencent à souffrir. Cela n’était pas arrivé depuis longtemps. Malgré tout, nous réussissons à avancer et nous parvenons même à profiter des rares paysages. Les collines au loin sont couvertes d’une végétation de type méditerranéen, très proches visuellement de celles du sud de la France. De nombreux chênes verts, des pins de taille normale, des herbes rases et sèches, jaunis par la canicule et enfin des grillons agrémentent notre journée. Je fais peu de photos néanmoins, car les paysages restent monotones.  Au kilomètre 26, je descends seul vers Keen Creek Reservoir pour filtrer plus de six litres d’eau, en suivant la route OR 66. Sur le topo, l’approche du petit lac n’est pas très claire. Point n’est grave, je décide de foncer droit dans la pente, au niveau d’une zone moins raide. C’est efficace, je suis vite au bord, dans une étroiture rocheuse. Par contre, pas de bol, je ne vais pas pouvoir m’éloigner du cadavre de cerf qui se décompose à moins de cinq mètres ! Les berges autour de moi sont bien inaccessibles, sauf à remonter et refaire plus de 500 mètres. Tant pis, je filtre et me nettoie bien les mains au gel Hydro alcoolique. Je croise les doigts pour que cela soit efficace. Je retrouve Hélène qui a vu passer deux, trois randonneurs. Ils ont décidé de ne pas s’arrêter et feront de l’eau dans 10 kilomètres. Régis est aussi présent. J’avais anticipé sa venue et je lui donne deux litres. Nous repartons, mais nous avons du mal à apprécier ce début d’Oregon. On sent qu’il va falloir mentalement rester concentré sur cette traversée qui s’annonce pour l’instant peu passionnante. Nous réussissons à faire du stop pour être amenés sur un couchage hors PCT que nous avions repéré, près de Hyatt Reservoir. Le Pacific Crest Trail Walking campsite est immense, et en travaux. C’est un bazar sans nom. Après cela fera l’affaire. Un autre randonneur, Jolly est présent. Nous l’avions déjà croisé il y a… 2 mois.  Au loin, au bord du lac, une soirée techno nous accompagne de basses assourdissantes. Vive l’Oregon ! On verra bien la suite. Keep Going.  J108 J107 Siskiyou Forest J107 Pilot Rock J107 Une dernière vue sur le Shasta J107 Du Shasta à Pilot Rock, l’immense Shasta Valley One step back Oregon One step forward