Jour 106 ~Scraggy Mountain to Works Fork Gap (Ashland)
25 Km 950 D+ 700 D- durée 8 h 00 Bye bye Californie ! Aujourd’hui nous quittons l’état de Californie pour celui de l’Oregon. Nous sommes à la fois contents d’être arrivés jusqu’ici malgré les obstacles et un peu déçus d’avoir dû éviter autant de miles sur les dernières sections. Après, nous n’avons pas de scrupules. C’est la règle du Trail et de la Marche longue. Nous devons composer avec les difficultés qui s’imposent à nous. Il est utopique de vouloir randonner autant de kilomètres sans que les contraintes environnementales ne nous jouent des tours. Entre les tempêtes de neige, les effondrements de ponts, les fermetures pour protection de grenouille, les vagues de chaleur, les incendies, nous ne nous en sortons pas trop mal. Certaines années, les hikers ont dû éviter jusqu’à plus de la moitié du chemin. Nous avons déjà marché plus. Donc on apprécie d’être encore sur la randonnée. Nous quittons le campement rapidement et poursuivons la longue avancée sur les crêtes entre Scraggy mountain, Condrey Mountain, Donomore Peak, Observation Peak. C’est un défilé de sommets de petites tailles que nous croisons. Nous continuons à souffrir de la chaleur. À cette contrainte s’ajoute l’absence d’eau qui est toujours pénible. Nous devons sans cesse veiller à ne pas être en manque, et anticiper les points de ravitaillement bien longtemps en avance. Cette veille obligatoire crée une tension permanente qui gâche un peu la randonnée. Il n’y a que deux sources sur la section. Au septième et au dix-huitième kilomètre, nous pouvons remplir les gourdes à convenance, et nous n’hésitons pas à prendre 3 à 4 litres afin de ne pas subir la canicule. Nous passons la frontière entre la Californie et l’Oregon au vingtième kilomètre, juste après avoir franchi la rivière Donomore Creek, dans la montée vers Donomore Peak. Un registre est présent. C’est un sacré moment. La Californie est un énorme morceau du PCT. C’est plus de la moitié du trail et surtout la section où se concentrent toutes les difficultés. Être arrivé jusqu’ici est déjà une vraie satisfaction. Les paysages de cette fin de Californie ne nous laisseront pas de souvenirs impérissables. C’est une progression sur des collines, en forêt, avec alternances de clairières d’herbes brûlées par la chaleur. Les sommets volcaniques ne sont plus visibles et l’omniprésence des fumées gâche le peu de panoramas existants. Le fait marquant du jour c’est la mauvaise plaisanterie d’un Trail Angel. Celui-ci nous a proposé de nous descendre un jour plus tôt à Ashland, notre destination de ravitaillement prévue pour le lendemain. À partir de là, il a organisé notre retour sur le trail. Cela devrait nous permettre de gagner du temps sur le passage d’Ashland en ne nous arrêtant pas au croisement entre le PCT et l’highway V, au lieu-dit Callahan’s restaurant. En pratique, on s’est fait rouler dans la farine. Il nous dépose à un supermarché bio. Les choix sont totalement inadaptés à des machines à ingérer des calories et sont hors de prix. Puis, le camping où nous nous réfugions est glauque et peu hiker friendly. On ne sent pas en sécurité. Enfin, nous finissons par apprendre que demain nous ne pourrons pas revenir sur le PCT à l’identique. Nous voilà gros-Jean de 20 miles. Ce pas pas bien grave, mais sur le principe cela énerve un peu. Heureusement un VTC Ubers est OK pour nous amener sur l’highway V au départ du PCT. Par contre, la conséquence de cette désorganisation c’est que nous avons dû modifier notre programme pour la prochaine section. Nous nous chargeons de 6 jours de nourriture au lieu de trois. Nous sommes bien lourds pour démarrer l’Oregon. Bref, opération pieds nickelés ! Keep going. J107 J106 Lever de soleil sur le nord Californie J106 Clairière dans les environts de Condrey Mountain J106 Un magnifique écureuil peu sauvage J106 LE registre de fin de Californie J106 Régis et Hélène à la frontière,Californie Oregon One step back Californie du Nord One step forward
Jour 105 ~Seiad Valley to Scraggy Mountain
33 km 1650 D+ 300 D- durée 12 h 00 Longue montée ! Les recommandations du jour sur le site du PCTA sont peu rassurantes : « People who are able to reach the PCT near Seiad Valley should take note of the very hot temperatures and potential for smoke. There’s a very large elevation gain as you head north from Seiad Valley. We recommend you start extremely early in the day and rest during the heat of the day. » Déjà que la semaine passée nous avons eu chaud, il semblerait que cela soit encore d’actualité. Nous verrons bien. Cela ne pourra être pas pire qu’il y a 3 jours. Du moins on l’espère. Nous quittons Seiad au matin, à 5 h 30. On sait que nous allons avoir une grosse ascension. En fait, c’est même simple, il ne va y avoir que de la montée. La bonne blague. Comme nous ne voulons pas être en plein soleil, le choix est facile, il faut être tôt à l’œuvre et avancer vite, si possible. Afin de ne pas perdre de temps, nous décidons de longer le PCT dès son début à partir de Seiad en suivant la route forestière sur vingt kilomètres. Nous avons été informés que le PCT chemine pendant un long moment sur une crête le long de Lower, Upper Devils peak, Kangaroo Mountain, Red Butte, et Cook Butte, plein est. Il est complètement exposé au soleil en raison des dégâts du Mc Kinney fire de 2022. Là-haut c’est terre aride, troncs d’arbres au sol et végétation de type Poison Oaks. Bref rien d’engageant. Nous ne serons pas les seuls à emprunter la route. Nous croisons au col de Cook and Green pass d’autres hikers qui nous confirment que le PCT est bien moche et pénible. Cela nous conforte dans notre choix. En plus, ce sera l’unique fois où nous mangerons de framboises de tout le chemin. Incroyable, elles sont parfumées à souhait, de tailles plus ou moins grosses, et surtout pour certaines d’entre elles, jaunes. Cette variété, Golden Queen est présente en Amérique du Nord. Au col, nous prenons le temps d’aller remplir les gourdes. La source est bien cachée, mais coule abondamment. Parfait. Nous repartons en direction de Copper Butter, à 1800 mètres d’altitude. Nous allons poursuivre la crête pendant 5 km, sur une courte section qui prolonge la portion que nous avons évitée. Nous ne pouvons qu’apprécier de ne pas avoir dû marcher sur le PCT entre Seiad et le kilomètre vingt. C’est non seulement pénible, mais c’est sans intérêt et de surcroît casse-pattes du fait des arbres au sol, les fameux widows makers (faiseurs de veuves) qui sont lésions ici. Les paysages sont maintenant ouverts sur l’horizon, mais restent malheureusement peu passionnants. Le sud est complètement opaque à cause des fumées du Shelly Fire, et au nord les collines de l’Oregon sont pour l’instant peu visibles. Les températures sont chaudes, mais plus supportables, aux alentours probablement de 38 °C. L’annonce du PCTA arrive trop tard pour nous. Nous avons déjà subi et nous nous sommes acclimatés. Par contre, nous restons sur la même stratégie, vitesse lente et hydratation massive, toujours plus de 5 l par personne. Aux kilomètres 31 nous perdons une vingtaine de minutes à trois à chercher la source. La localisation est des plus complexes, descendre une centaine de mètres et au niveau d’une prairie en pente, trouver une zone de boue. Effectivement, après être passés au moins 20 fois à côté nous finissons par enfin repérer les flaques et le mince filet d’eau. Une exploration solitaire doit être bien stressante. Nous arrivons au camp site en fin d’après-midi. De nombreux hikers sont déjà présents. Nous retrouvons l’ancien groupe de hiker de Régis de la Sierra. Nous apprenons que Waddle et son compagnon ont repris le chemin. C’est cool pour eux. Nous avons aussi droit à un moment improbable comme seul le PCT peut en offrir. Nous avions entendu parler d’une randonneuse avec un violon sur le PCT. Nous confirmons. Une musicienne professionnelle de l’orchestre philharmonique de Seattle est présente et répète ses gammes. C’est juste magique au milieu de cette nature immense. Demain nous devrions rentrer enfin dans l’État de l’Oregon après une séquence chaotique due aux incendies et à la canicule ayant franchement perturbé la progression californienne. Go to the North. J106 J105 The Wildwood RV Park J105 Régis et Hélène épatés par l’architecture du lieu J105 Les cicatrices noires du Mc Kinney Fire J105 Au loin, le trait blanc des fumées du Sheryl Fire J105 Séance brosssage de dent J105 Le campsite du soir One step back Californie du Nord One step forward
Jour 104 ~Mount Shasta to Seiad Valley
0 mile transports utilisés : bus & voiture Direction Seiad. Nous devons malheureusement contourner la section P, à savoir Shasta à Etna. Le Sheryl fire avait déjà fait fermer hier la portion d’Etna à Seiad, le feu étant présent sur le chemin. Nous avons eu confirmation en cours de journée que la sortie à Etna Summit est déconseillée. Elle sera d’ailleurs close 48 h 00 plus tard pour 3 jours. Les locaux sont tous à préparer un éventuel passage en niveau 3 de l’ouest de la ville. De fait, et on le comprend parfaitement, venir aider des vacanciers randonneurs alors qu’ils sont à deux doigts de perdre leurs biens est juste inenvisageables. Nous devons éviter Etna qui est devenu un camp retranché pour pompiers. Ils sont 1869, la bourgade ne faisant à peine que 700 habitants habituellement, ce soir à lutter contre le Shelly Fire avec un taux de maîtrise du feu de… 0 %. Après le ravitaillement du matin et après discussion avec Régis, nous choisissons de prendre le bus, puis un véhicule particulier. Un Trail Angel viendra nous récupérer à l’arrêt au transit Center d’Yreka. Nous montons dans le car et filons pour une heure de trajet au prix imbattable de 2 dollars. Étonnamment, nous ne sommes que 7 randonneurs. Certains ont quand même décidé de tenter d’aller jusqu’à Etna. Il y a comme une part d’égoïsme dans ce choix. Après chacun est libre de prendre les risques qu’il veut, sachant que les secours ne se déplaceront pas si vous êtes informés des dangers ! Au loin, à l’ouest de l’highway Five, les colonnes de fumée du Sheryl Fire sont effrayantes. Elles obstruent tout l’horizon et font probablement plus de 20 kilomètres de haut. Cela donne le ton. À Yreka nous nous réfugions dans la gare autoroutière, climatisée pour notre plus grand bonheur. Après une 1 h d’attente, Jeff le Trail Angel arrive avec sa Tesla. Une day hiker se joint à nous. Il est réellement sympathique et est très investi auprès de la communauté des hikers. Il se mobilise depuis le début du feu sur Etna, étant lui-même concerné. Le feu Mc Kinney Fire de 2022 s’était arrêté à moins de cent mètres de sa maison embrassant toute la Klamath River. Effectivement nous avons vu la zone où il vit, c’est impressionnant et effrayant. Plus d’arbres, les collines sont rasées et même la végétation basse, herbes ou buissons n’ont toujours pas repris un an après. Les sols sont ici aussi à nues et les restes détruits des plus de 200 habitations sont encore présents, comme dans la ville de GreenVille que nous avions traversé il y a 10 jours. Au final ce sont plus de 200 km de section qui sont devenus inaccessibles. Certes, cela fait partie des aléas du PCT, mais les incendies sont précoces cette année et surtout nombreux. Ce soir à Seiad au Wildwood RV Park, nous sommes impressionnés, le camp est vraiment baroque. Nous avons des hikers qui viennent de sortir de la section et qui ont fini sur le fil du rasoir, avec fumées et même évacuation en urgence pour certains, le feu étant sur leurs talons. Ils ont été obligés de faire des étapes de plus de 40 kilomètres. Un second groupe a fait demi-tour sur deux jours sur le PCT entre Shasta et Etna, les suies et les pluies de cendres obligeant à porter un masque. Ils sont très critiques sur les conditions de marche, avec pour certains des crises d’asthme. Et il y a enfin la troupe dont nous faisons partie, qui a eu l’information dès leur arrivée dans la ville de Shasta. Chacun espère que la suite sera plus calme, mais ce n’est même pas sûr. Deux autres feux sont présents, à l’est le Bogus Fire et au nord le Salt kriek Fire. Bref on va sentir le fumet de bois pendant quelque temps. Nous prenons le temps d’aller manger une glace à l’épicerie du coin au Seiad Valley Store. Le lieu est baroque à souhait. Des animaux empaillés trônent fièrement au milieu des spiritueux et des cartons. Le top étant les improbables LapinCerf ou ChipmunksChamois qui campent sur un micro-ondes hors d’âge. Une vraie caverne d’AliBaba. Pour demain, la canicule devrait diminuer d’intensité, avec des températures aux alentours de 37, 38 °C, alors que la moyenne en cette période est plutôt de 27 °C, cela reste chaud. Nous sommes plus de vingt ce soir. Le propriétaire du campsite propose, contre rémunération de faire le repas. Ce sera hot dog pour tout le monde. La Californie et l’Oregon sont vraiment en difficulté en ce début juillet. Pour la randonnée cela est toujours bien extrême. Il va falloir continuer à s’hydrater massivement. Keep Going. J105 J104 Jeff le Trail Angel J104 Régis et Hélène J104 State of Jefferson Scenic Biway à Seiad J104 LapinCerf et Chipmunk Chamois ! J104 Un Régis en forme J104 Le campsite du soir One step back Californie du Nord One step forward
Jour 103 ~Cabin Creek TrailHead to Mount Shasta
26 km 700 D+ 800 D- durée 6 h 30 Journée étonnante. Nous allons avancer à un rythme d’enfer. La moyenne est de 4 km/h, avec des kilomètres marchés à plus de 5 km/h, malgré la chaleur, la fatigue et les dénivelés. D’aucuns diraient que cela sent l’écurie ! Savoir que nous allons dormir à Shasta ce soir, dans un hôtel, propre est un vrai carburant à randonneur. Nous décidons de faire au plus vite pour pouvoir bénéficier d’un après-midi un peu plus long pour faire nos courses. Nous ne mettons que 6 h 30, pauses incluses, pour arriver au Trailhead vers 13 h, et faire les 26 km ! La conséquence est que je ne ferais quasiment pas de photos, nous n’avons pas le temps de nous arrêter. Cela tombe bien, nous continuons à évoluer en forêt, les paysages sont toujours… inexistants. Par contre, nous commençons à presque apprécier cette forêt, même si c’est la national Forest la plus austère et la plus inhospitalière que nous traverserons. Cela a presque son charme, sous réserve de ne pas y rester pendant des semaines. Après avoir longé Yé Atwam Creek sur à peine un kilomètre, nous entamons la longue montée sur près de dix kilomètres vers un sommet sans nom. Nous croisons 3 pistes, Squaw Valley Creek Road, Politically Correst Creek Toad, et enfin Bear Trap Creek Road. Il n’y a qu’aux USA que l’on ose appeler une route en politisant celle-ci et en effaçant l’Histoire, car sur certaines cartes l’autre nom est Yé Atwam Creek Road ! Juste après ce carrefour, nous sommes brutalement plongés dans un brouillard jaunâtre et odorant. Cela sent le feu de cheminée et le bois brûlé. Nous nous arrêtons et surveillons les alentours, pas très rassurés. Il ne semble pas y avoir d’incendies à proximité. Nous réussissons à avoir du réseau et regardons l’application WatchDuty qui est devenue un intournable de la sécurité du chemin. En fait le vent a tourné durant la nuit et ce sont les fumées du Sherryl Fire d’Etna, 100 km au Nord, qui recouvrent les plaines autour du Shasta. C’est impressionnant, tous les fonds de vallées, mais aussi les rares sommets visibles sont dans une mélasse visuelle. Ce n’est pas bon signe cette histoire. Si le vent pousse le Shelly Fire vers le sud, cela signifiera une fermeture de la prochaine section, entre Shasta et Etna. Nous savons que l’incendie n’est absolument pas maîtrisé. Le site californien des pompiers indique par ailleurs un maintien de l’alerte extrême pour canicule, qui vient compliquer leur travail. On fera le point cet après-midi, mais l’ordre d’évacuation niveau 2 d’une partie des zones autour du brasier donné. Cela signifie que vous devez être prêt à quitter l’endroit où vous êtes en moins de deux heures. Ce qui, sur le PCT peut être… compliqué, voire impossible sans hélicoptères ! Pas cool. Nous passons la marque écrite au sol, par les randonneurs, 1500 miles, soit 2400 kilomètres en fin de matinée. Nous avons maintenant l’impression d’avancer vite, malgré les difficultés. En arrivant au Trail Head à Soda Creek, au niveau de la rivière Sacramento, nous remplissons un registre inhabituel. Il nous est demandé de communiquer nos noms, prénoms, numéro de téléphone, mais surtout les coordonnées de nos balises GPS de secours. Les locaux font remonter à heures régulières aux pompiers le nombre de randonneurs qui s’engagent dans la portion Soda Creek vers Etna Summit, en prévision d’une possible évacuation si le feu au Nord venait à fermer cette portion. L’ambiance est peu rassurante, surtout avec la vague de chaleur qui continue à sévir depuis une semaine maintenant. Sur un panneau de signalisation, un numéro de téléphone est affiché. Nous contactons le Trail Angel qui se propose de nous récupérer, et de nous emmener à la ville de Shasta. En fait il est déjà en route et arrive dans 10 minutes, un autre randonneur juste derrière nous sur le chemin l’a joint 30 minutes plus tôt. Cela s’appelle avoir de la chance. Nous serons quatre. Le hiker avec sa chaussure détruite croisé il y a 2 jours nous rejoint moins de trente minutes plus tard. Il est bien fatigué par sa progression en 1/2 soulier. Nous sommes enfin à Shasta. Nous filons immédiatement manger. À l’hôtel que nous rallions en débit d’après-midi, nous faisons le point. Les nouvelles d’Etna ne sont pas bonnes. Les locaux nous conseillent de ne pas démarrer la section pour ne pas gêner le travail des soldats du feu. Le chemin n’est officiellement pas fermé, mais avec les vents qui sont en train de tourner cela va probablement être le cas sous 48 h 00. Après discussion avec d’autres hikers, décision est prise : la sécurité avant tout. Nous passons à la lingerie, et partageons l’espace avec les pompiers qui reviennent du front, et qui viennent laver leurs affaires. Ils ont l’air bien fatigués et sont bien couverts de suie. En fin de soirée, nous avons un appel téléphonique de Régis, il était à 30 kilomètres derrière nous. Nous mangerons ensemble le dîner au Black Bear Diner, restaurant bien américain, hamburgers, tables en bois et décoration Cowboy. Nous rentrons en début de soirée, et filons tôt dans notre lit king size. Demain, nous consacrerons la journée de à organiser la montée par route vers Seiad. Nous serons donc une semaine plus avant que prévu en Oregon, la partie évitée correspondant à cinq étapes de marche. Les feux sont devenus une des difficultés du PCT en ces temps de réchauffement climatique. Malheureusement, il fait faire avec. Go to Canada. J104 J103 Le mont Shasta au matin J103 A la sortie vers Castella, Dunsmuir et Shasta J103 Ce n’est pas des nuages, mais de la…fumée partout J103 2400 kilomètres J103 La seule pause de la matinée One step back Californie du Nord One step forward
Jour 102 ~Deer Creek to Cabin Creek Trailhead
35.5 km 750 D+ 1350 D- durée 11 h 00 Journée aussi chaude que la veille. La bonne nouvelle, c’est que nous avançons plus vite. Les organismes s’habituent ! Nous avons toujours des températures qui sont à 41 °C sous abri. Nous avons heureusement la chance de rester à l’ombre sous le couvert d’arbres immenses pendant une grande partie de la section. Cela change tout. Là où la veille, nous avions dû attendre 19 h pour poser la tente, ce soir nous arrêtons de marcher à 17 h. Nous allons pouvoir dormir plus tôt. Par contre et c’est la conséquence d’avancer dans une forêt dense, nous n’aurons pas un seul panorama sur les sommets environnants. À l’exception du passage de Through Creeks, où nous aurons quelques vues sur Bald mountain, le reste du temps, le champ de vision est obstrué par les arbres les plus hauts qui soient. La canopée est à plus de 50, 70 m et l’ambiance est très particulière. Nous avons l’impression d’être des Lilliputiens. Il n’y a plus un bruit. Les oiseaux sont absents, réfugiés au sommet des géants, les pentes sont trop raides, et les cerfs sont dans les prairies en bas de vallée. Même les écureuils et chipmunks ont déserté les sous-bois ! En montant à flanc des collines, on passe au pied des pins et nous croisons la crête de ceux-ci après 15 minutes d’ascensions, les effets de perspectives sont vertigineux. De temps en temps, un puits de lumière permet à quelques plantes de pousser, mais c’est rarissime. Le long des rivières, des vivaces à feuilles immenses font penser à nos Guneras européennes, sans les épines, et créent des contrastes saisissants. Le vert presque fluo tranche sur le sol et les roches sombres. Au treizième kilomètre, nous arrivons au Ash Camp au niveau de la Mc Cloud River que nous franchissons via un magnifique pont de bois. Un trail magic présent sera décevant, il ne reste plus que des pansements et des bricoles sans intérêt pour les randonneurs. Par chance, il y a des céréales pour le petit déjeuner. Cela tombe bien, j’étais en panne de oatmeals et le chocolat en poudre seul est insuffisant pour amener suffisamment de calories. Ce soir, nous dormons avec plusieurs hikers au campground de Squaw Valley Creeks. Nous trouvons de nouveau un trail magic, mais comme de souvent, les prédécesseurs ont tous bu où manger. Point n’est grave, c’est la règle du chemin. Nous sommes huit. Tout le monde est bien rincé avec cette chaleur suffocante, mais chacun a réussi à avancer sur des bases de plus de 35 km/jour. On sent que le groupe est rodé à l’exercice. Les randonneurs ont maintenant plus de 2000 kilomètres de marche dans les pattes. Les gens discutent, un immense feu est en train de s’approcher du PCT au nord de la ville d’Etna, que nous devrions atteindre dans 3 jours. Le trail est pour le moment praticable, sous réserve de fumées importantes et omniprésentes. Au-delà c’est devenu impossible le Shelly fire ravage les Marbles Moutains. Nous croisons les doigts en espérant que la route qui rencontre le PCT à Etna Summit ne soit pas fermée dans les prochaines heures. Si cela venait à arriver, cela empêcherait en plus la section aval du chemin. On verra bien demain. Nous montons la tente sur un espace où nous pourrions nous installer à plus de 20. Nous nous éloignons à plus d’une dizaine de mètres les uns des autres. On sent que nous avons tous besoin d’intimité et de calme. À 18 h, certains d’entre nous ont déjà commencé leurs nuits. Demain, enfin, nous serons en ville pour aller faire le ravitaillement à Shasta. Cela va faire du bien au moral de pouvoir abandonner un moment l’entêtant parfum typique des PCT hikers. Même si nous avons pu nous nettoyer en totalité dans l’eau à 10 degrés de Yét Atwam Creek cela n’a pas l’efficacité d’une vraie douche. Cela fait maintenant six jours que nous sommes dans le dur, à part quelques rares toilettes de chat nous sommes couverts de poussière en permanence. Keep Going J103 J102 Les immense forêts de Shasta National Forest J102 Le PCT en mode parcours du combattant J102 Ptérospore à fleurs d’andromède J102 Au passage d’un des nombreux torrents J102 Un puit de lumière, 70 mètres sous les frondaisons J102 L’aval de Mc Cloud River J102 L’amont de Mc Cloud River J102 Le campsite du soir J102 Séance entretien des pieds One step back Californie du Nord One step forward
Jour 101 ~Kosk Spring to Deer Creek
36 km 1050 D+ 1150 D- durée 12 h 30 Toujours plus chaud. Nous sommes en pleine heat wave californienne ou vague de chaleur. Ce n’est plus une vague, c’est un tsunami. Il fait plus de trente degrés au réveil, alors que nous sommes à 1600 mètres d’altitude. On n’ose imaginer ce que ce doit être en vallée, 1000 mètres plus bas. Nous nous levons tôt. C’est la solution pour pouvoir profiter au maximum du matin. La journée est annoncée encore très chaude. Elle le sera, probablement au-dessus de 41 °C comme la veille, mais surtout les températures sont maintenant à plus de 40 °C en continu de 13 h à 17 h. Un vrai four. La forêt essaie de garder sous les frondaisons un semblant de fraîcheur, mais c’est peine perdue. C’est du coup usant et compliqué d’avancer en étant efficace. Il faut profiter de la moindre brise, de toutes les zones d’ombres et boire. Nous allons d’ailleurs ingurgiter plus de 7 l d’eau chacun. Ajoutez à cela les quantités nécessaires pour les repas et nous sommes presque à vingt litres filtrés sur la journée. Un vrai sacerdoce, mais une réelle obligation, il ne s’agirait pas en plus d’attraper une parasitose. Nous avons l’impression d’être des chameaux. Pour être certain que cette journée sera la plus compliquée, il y a une longue portion de 17 km sans ravitaillement, que nous devrons parcourir aux heures les plus chaudes. Ce sera pénible à gérer. Les sacs sont lourds et nous allons cumuler les difficultés. Tout d’abord, une erreur de trajectoire au passage d’un névé nous oblige à faire deux kilomètres de plus. Parce que oui, sur le PCT même par 41 °C, il y a encore de la neige pour vous pourrir la vie. Ensuite, le chemin est complètement encombré d’arbres anciens ou récemment tombés qu’il faut franchir, comme on peut. Nous voilà, dessus, dessous les fûts morts, avec, sans le sac à dos, en contournant, en rampant, en faisant les acrobates de branche en branche, dans une presque jungle. Nous aurons droit à toute la panoplie du parfait hiker dans les forêts californiennes. Du coup, nous mettrons beaucoup plus de temps que prévu, juste dans la portion où précisément il ne faut pas en perdre. Le moral en prend un coup. Après, on relativise, les autres rares randonneurs sont dans le même état que nous. Pour couronner le tout, les paysages sont… aux abonnés absents. Vous n’avez droit que de temps en temps à une vue qui permet de se faire plaisir. Le reste est obstrué par la végétation. Vers midi, heureusement, et sur un malentendu, nous empruntons une piste qui longe le PCT. Nous entendons au-dessus de nous les autres randonneurs pester sur les buissons qui griffent, et fouettent les visages. Nous savourons ce moment où nous avançons rapidement sur un tapis de fleurs incroyables avec des panoramas enfin présents. Sauf qu’il fait… au moins 50°. Il ne faut pas trop traîner. Nous marchons du mieux possible sur une vague arrête, entre Mushroom Rock et Pigeon Hill. Juste après avoir dépassé celle-ci, nous prenons le temps de suivre une piste hors PCT pour aller à la rivière Gold Creek. Le lieu est salvateur, nous attendions ce moment avec impatience. De l’eau, enfin ! Nous sommes 5 hikers, assoiffés. Nous discutons tous de l’épreuve que cela a été de venir jusqu’ici. Un des randonneurs est en plus avec une chaussure éventrée depuis maintenant une trentaine de kilomètres. Il avance tant bien que mal, avec les orteils qui sortent à chaque pas, de ce que nous pouvons plus appeler un soulier. Nous ne traînons pas et filons. Il nous reste encore sept kilomètres avant la prochaine source, où nous camperons. Le passage des pentes rocheuses qui dévalent sur plus de 1200 mètres de hauteur Grizzly Peak va être le moment le plus compliqué de la journée. Nous courons presque entre les zones d’ombres. Au soleil, nous sommes essoufflés en quelques minutes et les bâtons de marche en carbone deviennent brûlants au point de ne plus pouvoir les utiliser. Avancer se résume à s’arrêter 5 min, sprinter sur 10 min, puis recommencer. Nous mettrons une heure pour faire moins de deux kilomètres. L’enfer ! Nous arrivons après cette épreuve du feu à la rivière Deer Creek. Le campement est chaotique. Il n’y a pas de vraie zone aménagée, heureusement 50 mètres en amont sur le chemin, nous avions cru voir un espace possible. C’est le jackpot. Le lieu est parfait. Nous installons la tente et en profitons pour regarder la cime des arbres au-dessus de nous, à presque 70 mètres. Nous avons l’impression d’être dans une cathédrale immense. Demain, il est probable que cela soit… la même chose. Pas cool. Keep Going J102 J101 Vue sur le mont Shasta au démarrage J101 Dans l’enfer vert du PCT J101, l’impression maître des lieux J101 Lys Lady Washington lily J101 Visite d’un cerf pendant une pause J101 Spirée de Douglas J101 Une des rares vues du Shasta en forêt J101 L’erreur de chemin la plus chouette du jour J101 Rare moment sur les crêtes hors forêt J101 Une chaussure à l’agonie J101 Zone d’ombre salvatrice sous Grizzly Peak J101 Les incroyables pentes de Grizzly Peak One step back Californie du Nord One step forward
Jour 100 ~Burney Falls Campground to Kosk Spring
36 km 1350 D+ 700 D- durée 12 h 30 Centième jour ! Nous avons quitté la frontière mexicaine en mars et nous voilà, au cœur de l’été californien, avec l’impression que c’était hier. Cela donne le vertige. Les étapes et les kilomètres s’accumulent. Nous commençons à peine à prendre la mesure de l’incroyable folie pédestre imaginée par les concepteurs du PCT. Comment est-il possible d’arriver à croiser aussi peu de route, de ville, de trace de civilisation. On a beau savoir que les USA sont peu densément peuplés, c’est quand même bluffant. Nous sommes bien Into The Wild, comme décrit par les Américains. Dans, Avec, Au milieu du Sauvage ! C’est tout cela à la fois le PCT, et bien plus encore. Être dans la Nature c’est aussi une perception différente du quotidien de nos activités civilisées. Se lever et se coucher avec le soleil, chercher son eau et accepter de boire au gré des torrents, ne plus dépendre d’une montre et d’un temps souvent artificiel. C’est un aspect étonnant de la vie du chemin. Après un lever rapide, nous voilà de nouveau à avancer sur un trail poussiéreux qui se faufile dans la forêt de Shasta National, à l’ouest et au nord du lac Britton. Nous croisons celui-ci en marchant sur le barrage Pit N°3, vers Gaging Station sur une route bitumée à plus de 50 mètres de haut au-dessus de la rivière Pit. L’eau du lac se jette en contre bas en un vacarme assourdissant. Nous sommes seuls au matin. Nous entrons dans les immenses forêts ou nous allons être isolés pendant quatre jours au niveau de Clark Creek Road. Nous avons de nouveau l’impression de plonger dans la gueule du loup, en une fuite en avant avec unique échappatoire dans 96 heures ! Ce sera le cas, nous allons entrer dans un effrayant tunnel vert, avec toutes les versions de la progression en futaie. Les arbres sont gigantesques entre 50 m et 70 mètres de haut, sans aucune pousse en dessous. Quand des clairières existent, des arbustes de plus petites tailles recouvrent une végétation dense qui occulte tout, y compris le chemin en un tableau fantasmagorique. À cinq mètres de distance, il m’est impossible de visualiser Hélène. Si elle est à plus de 10 mètres, elle devient inaudible, la flore créant un isolant phonique extraordinaire. Il s’agirait de ne pas de se perdre ! La seule fois où nous aurons une vue dégagée, un aperçu impressionnant sur le Mt Shasta s’offre à nous. C’est réellement un cône volcanique quasi parfait. C’est vraiment beau et nous avons hâte d’avoir un panorama plus conséquent sur la région. La bonne nouvelle qui accompagne cet environnement sylvestre, c’est que nous avons de l’ombre sur plus de 80 % du sentier. L’autre point positif et heureusement, c’est la présence d’eau tous les six kilomètres. Avancer, malgré les températures effrayantes de 41° avec une hygrométrie de forêt tropicale, sans vent est une authentique épreuve. Nous n’avons pas eu de moment de fatigue ni de coup de chaleur, mais on sent bien qu’il faut rester vigilant. Les rares fois où nous passons au soleil, l’air dépasse allègrement les 50 voire 55 °C. En quelques minutes, cela devient suffocant puis apparaissent des maux de tête et une sensation désagréable de malaise. Il est impératif de vite regagner l’ombre. Malgré ces conditions difficiles, nous avançons plutôt bien. Cool. Nous allons boire plus de 6 l d’eau par personne durant l’étape. Impressionnant ! Cela nous a permis de tenir le programme que nous nous étions fixé. À partir du cinquième kilomètre, nous ne ferons plus que monter, jusqu’au trentième kilomètre, amenant à un dénivelé conséquent en fin de journée de plus de 1000 m. Ça use. Ce soir nous dormons le long d’une route forestière, près d’une rivière. Le site de campement est correct, mais l’ambiance est moyenne. Des panneaux Private Property rappellent que nous ne sommes que tolérés. C’est d’ailleurs une étape où nous avons eu un entretien très minimaliste du sentier. Le propriétaire ne force pas son talent pour faciliter la progression des randonneurs. C’est aussi cela la vie du Trail. Keep Going J101 J100 Britton Lake J100 Hélène sur le barrage non loin de Gaging Station J100 Les eaux magnifiques du Britton Lake J100 Pit Creek J100 Un si long tunnel vert J100 Pont sur Rock Creek J100 Le mont Shasta J100 Rares clairières, à plus de 50° One step back Californie du Nord One step forward
Jour 99 ~Bald Mountain to Burney Falls Campground
34.5 km 300 D+ 700 D- 12 h 30 Journée cuisson lente. Nous avons décidé avec Régis de partir le plus tôt possible. Nous savons que la vague de chaleur annoncée est à l’œuvre : il va faire 41 °C ! Et quand il n’y a pas d’ombre… cela devient compliqué, voire dangereux. Nous avons en plus identifié que les points d’eau sont plutôt rares sur cette section. C’est un vrai challenge de Thru hiker, combo de portage lourd, vitesse lente, et pauses obligatoires, idéalement toutes les heures. La conséquence de cette avancée particulière est que, pour environ 8 h 30 de marche effective, nous allons mettre 12 h 30 pour arriver au campement du soir. On est plutôt fier de nous, dans ce contexte extrêmement défavorable. L’autre difficulté est la gestion de l’eau. Nous allons boire presque 5 l par personne. C’est un minimum que nous aurions pu allégrement dépasser si nous avions eu la possibilité de nous ravitailler plus souvent. Nous démarrons en continuant de suivre en hauteur la plaine de Hat Creek Valley. A hauteur de Six Mill Hill, nous descendons rapidement par une échancrure de la falaise vers celle-ci. Nous marchons sur un sol rocheux, coulée de lave noir cordée, terrible pour les chaussures. C’est abrasif et coupant. Les nombreuses crevasses créaient au moment du refroidissement ont rendu le chemin cassant. Heureusement, le passage des randonneurs a fini par boucher les pièges. Des arbres réussissent à pousser dans les moindres étroitures ajoutant quelques touches de verdures. Malgré une datation ancienne d’environ 1000 ans, nous avons l’impression que l’éruption était hier. C’est étonnant. En arrivant dans la plaine, nous changeons de chemin, le sol est couvert d’une fine couche de poussière. On va être bien sale ce soir. Au huitième kilomètre, nous rencontrons une trail Angel qui a garé son 4×4 sur le PCT. C’est magique, nous allons pouvoir manger un deuxième petit déjeuner à 9 h. Avec la chaleur qui se prépare, elle offre boissons fraîches, cookies maison, chips, fruits à gogo, bonbons, eau en jerrican. C’est un bonheur absolu pour les hikers. Nous sommes moins d’une dizaine et nous restons presque une heure. Nous repartons et avançons dans des paysages qui donnent l’impression d’être au milieu d’une savane africaine. Les herbes sont brûlées par la canicule, et de rares arbustes présents concèdent de temps en temps des refuges ombragés salvateurs. Au loin le cône parfait du mont Shasta crée la sensation d’être au Kenya et de voir vers le Kilimandjaro. Régis a accroché un drapeau américain à son sac et participe fièrement au 4 juillet. Aux dix septièmes kilomètres, nous passons la rivière Hat Creek, et trouvons une table de piquenique à l’ombre dans une pisciculture Crustal Lake State Fish Hatchery. Nous prenons le temps de faire une pause déjeuner conséquente. Des femmes en camping-car, nous identique comme PCTiste, et nous offre des boissons fraîches. Cool. Nous repartons sous un soleil de plomb. Malgré un chemin en forêt, le long du lac Britton, nous sentons que c’est une vraie épreuve. Au 21 kilomètres, Régis décide de quitter le PCT et de se rendre au Burney Mountain Guest Ranch. Le lieu est annoncé hiker friendly et il vaut aller prendre une bière pour fêter le 4 juillet. Hélène et moi déclinons l’invitation, consommer de l’alcool serait, pour nous, le meilleur moyen de couler une bielle. Nous convenons du campement et nous voilà repartis vers la section la plus terrible du jour. Nous entrons dans Shasta National Forest. C’est un véritable four, il doit faire plus de 50 degrés en plein soleil. Nous évoluons dans Harkright Flat, immense zone avec peu d’ombre. C’est réellement compliqué, le sol se soulève en une poussière rougeâtre qui vient se déposer sur nos jambes. Nous sommes couverts de terre ocre. Et dire que nous ne sommes qu’au deuxième jour sur six, de notre montée vers la ville de Shasta. Nous arrivons tard à Burney Falls. Nous avons vu sur le topo qu’il y a un robinet ouvert. Incroyable, nous sommes seuls, nous avons un immense camping rien que pour nous. Nous cherchons pendant une dizaine de minutes le fichu point d’eau. Il est bien visible, mais avec la fatigue nous ne sommes plus très lucides. Au pied de celui-ci une dalle de béton de 2 m² permet de faire une toilette complète. La couleur du rinçage est à l’image de la journée, rouge ! Nous ne voyons pas arriver Régis ce soir. Pas étonnant, le passage par le Ranch a dû être délétère sur son avancée. Demain normalement ce devrait être plus facile, il y a plus de points d’eau Keep Going J100 J99 L’immense plaine de Hat Creek Valley J99 Dans les coulées de lave sous Six Mill Hill J99 Les arbres essaient de pousser dans la lave J99 1400 miles, ou 2450 km ! J99 Un vrai 4 juillet J99 Chardon Cirsium occidentale J99 Le trail magic du jour J99 La plaine de Cinder Flat Area J99 Au loin le mont Shasta One step back Californie du Nord One step forward
Jour 98 ~Old Station to Bald Mountain
32 km 500 D+ 600 D- durée 10 h 30 Étape caniculaire. Après une nuit agréable dans des draps propres, nous filons au petit déjeuner au JJ’s Café. Surprise, nous retrouvons Régis. Il est arrivé la veille en stop, en suivant le même parcours et en ayant droit aux mêmes galères. Il a fait la section après le Bear Fire et était juste une journée devant nous. Il a dû marcher sur une piste forestière et le PCT est vraiment trop abîmé. IceBreaker quant à elle va sur Chester où elle restera pour assister au 4 juillet, fête nationale américaine. Nous partons plus tardivement que prévue, du fait de l’ouverture de la laverie vers 8 h. Le temps de nettoyer et faire sécher les vêtements, nous ne sommes sur le PCT que vers 10 h 30. La journée est annoncée bien chaude et on s’attend à avoir 37° à l’ombre. Ça va être sportif en plein soleil de midi. On verra bien, mais cela risque d’être assez éprouvant. Nous prenons 5 l d’eau chacun au départ. Le portage est bien lourd entre la nourriture pour 5 jours et toutes les gourdes pleines. Nous n’avons pas le choix, il n’y a pas de sources pendant… 28 km. Nous voilà revenus aux heures fastes du désert et de la Sierra associée. Nous démarrons par une courte montée, dans une zone brûlée, avancée ultime au nord du Dixie Fire, pendant 3 kilomètres. Quand on imagine la surface détruite, un carré de 52 *52 km, c’est hallucinant. Nous ne regrettons pas d’avoir sauté la portion concernée. C’est bien glauque, les arbres sont morts, et la végétation basse essaie de reprendre vie. Une poussière de suie est omniprésente. Ce sera le thème récurrent de la journée, la région a été particulièrement abîmée par les feux récents et anciens. Au cinquième kilomètre, nous arrivons à un parking vers Mud Lake avec un mémorial aux victimes du Burney Fire de 2009. Le panorama sur l’immense vallée de Hat Creek et le plateau Hat Creek Rim que nous allons suivre pendant les 25 km est peu rassurant. Ça va être long et suffocant. Les traces du feu sont encore présentes 15 ans après, même si la végétation rase a repris. Il n’y a plus un seul pin, c’est une vraie hécatombe. En contrepartie, les vues dégagées qui s’offrent aux randonneurs sont magiques. Le mont Lassen bien enneigé à notre gauche, et le mont Shasta, copie du mont Fuji domine la vallée en contre bas. La plaine aride qui fait penser à la savane africaine est jaune paille. La sécheresse commence. Le chemin progresse sur un sol volcanique rougeâtre de latérite bien salissante. Au quinzième kilomètre nous croisons la source de Lost Creek. Pour se ravitailler, il faut descendre de 100 mètres de dénivelé sur plus de 500 mètres, puis remonter. Nous faisons le point, il nous reste assez d’eau pour aller jusqu’au prochain réservoir. Nous ne nous arrêtons pas. Aux vingt deuxièmes kilomètres, nous retrouvons Régis qui nous attend sur un banc, isolé au bord d’une piste, au niveau d’une antenne téléphonique. Nous sommes presque en panne hydrique. Nous filons d’un bon pas vers la cache salvatrice. Encore cinq kilomètres, ça va être limite. Effectivement nous arrivons tous déshydratés et sans eau à la route 22. Le réservoir est plein et nous refaisons les réserves. Nous découvrons après avoir rempli pendant bien une demi-heure nos gourdes la présence d’un Rattle Snake à moins d’un mètre dans la citerne ! Visiblement, celui-ci s’est habitué aux randonneurs et ne fait plus signe d’agressivité. Étonnant. Nous repartons, il nous reste encore bien une heure trente de marche. Nous arrivons à la nuit au campement, avec un coucher de soleil majestueux qui illumine le mont Shasta au loin. Nous sommes couverts de poussières et le nettoyage est compliqué. Je pense qu’à la première rivière, on sauter dedans. Demain on se lève tôt pour éviter au maximum la chaleur. On verra s’il est possible de marcher 35 km dans ces conditions caniculaires. Les températures vont encore grimper. Keep Going J99 J98 Au départ d’Old Station, le Dixie Fire J98 La végétation essaie de repousser J98 Première vue sur le mont Shasta J98 Le Lassen au dessus d’Old Station J98 Calochorte à gros fruits J98 Vautours qui profitent des vents thermiques au dessus de Hat Creek Rim J98 Les nouveaux pins 15 ans après le passage du Burney Fire J98 Le mont Shasta qui domine la plaine de Hat Creek J98 Rattle Snake sous la réserve d’eau ! J98 Le même Rattle Snake réfugié sous son caillou J98 Le PCT au environ d’Antelope Reservoir J98 Coucher de soleil, il est temps d’arriver One step back Californie du Nord One step forward
Jour 97 ~Pilot Peak to La Porte Road (Old Station)
0 miles…à pied. Plus de 200 km avec différents véhicules. Journée de transition. Nous avons deux objectifs, le premier et le plus simple : faire le ravitaillement à Quincy. Le deuxième, plus compliqué, aller jusqu’a Old Station, plus au Nord au niveau du Parc du volcan Lassen. Nous espérions avoir du réseau pour essayer de prendre un Uber à la sortie du PCT au niveau de La Porte. Il n’en sera rien, pas de web. Nous sommes conscients que cela va être difficile. Surtout, pour faire le trajet de Quincy vers Old Station. Le système D pour débrouille va être à utiliser toute la journée. On commence par le plus simple, 1,5 km pour quitter le PCT et rejoindre la route qui nous conduira en ville. À l’accoutumée, levé à 6 h, marche à 7 h 30 et objectif atteint à 8 h. Trop facile. Et là, coup de bol, on moment où on sort du PCT, on voit un véhicule qui dépose un randonneur et repart… sur Quincy. Celui-ci interpelle son collègue et nous voilà, après à peine deux minutes d’attente au milieu de nulle part, déjà en partance. C’est inespéré. Un PCTiste arrivé juste après nous reste à escompter un prochain stop. Il fallait être rapide ce matin. Régis à cet endroit mettra plus de 4 h avant de bouger. La voiture est par contre une vraie épave ! Le pare-brise est étoilé, ma ceinture de sécurité ne marche pas et les sièges sont éventrés ! Pas grave, le conducteur est sympa et nous amène jusqu’au supermarché de Quincy. Un grand merci à lui Le ravitaillement des 6 prochains jour au SafeAway se fait sans difficulté. Dans celui-ci nous aurons droit à un trail magic surréaliste. Je croise une grand-mère de plus de 80 ans, qui me demande si je suis un PCTiste. Je réponds par l’affirmative et celle-ci de s’extasier et de nous féliciter de venir découvrir et faire vivre leur région. Jusqu’à là rien d’extraordinaire et nous repartons vaquer à nos affaires. Sauf qu’à peine 10 minutes plus tard nous la recroisons de nouveau, celle-ci fonce alors sur nous et met dans le sac d’Hélène un billet de 20 dollars. Confus, on essaie de refuser, car nous voyons bien qu’elle a plus besoin de cet argent que nous. Rien n’y fait : « It’s a gift for your trail. I want to be a part of your adventure! » Décidément, les Américains nous surprendront toujours. Après les courses, nous remontons Lawrence Street en direction de l’intersection de la route Crescent Street, qui nous permettra d’aller sur Chester. Et… là, c’est la poisse. Plus d’une heure, rien, nada, aucune voiture ne s’arrête. Heureusement, nous sommes à un arrêt de bus et nous savons qu’au pire dans deux heures nous pourrons rejoindre Chester. En attendant, on sollicite tous les véhicules… sans succès. Soudain, une énorme dépanneuse de camion s’arrête. Le conducteur nous explique qu’il peut nous déposer 10 miles plus loin à un autre croisement vers Chester et que le stop sera plus efficace là-bas. On hésite, puis finalement on tente. Les sacs à dos sont jetés à l’arrière du truck. Nous montons et nous voilà à plus de 2 mètres de haut dans un engin délirant, 6 roues motrices, un cockpit d’avion. Bluffant. Le camionneur va récupérer dans un canyon un quinze tonnes de pompiers en panne. Celui-ci nous pose à Twain WB Weigh Station. Le lieu est intégralement brûlé et nous sommes en plein soleil. On croise les doigts pour ne pas être coincé ici. Sauvé ! Dix minutes, après notre arrivée, un homme de 75 ans nous prend en stop et nous amène après un détour de plus de 40 miles à Chester. Un vrai Ange du Trail. Il nous raconte le feu de 2021, en sachant qu’il n’a pas quitté son domicile, à Crescent et que celui-ci s’est arrêté aux portes de la ville. Visiblement cela a été l’enfer ici. Il a vécu un mois encerclé par les flammes, sans électricité. Quelques kilomètres après son domicile, on croise la ville de Greenville, 1200 habitants. C’est saisissant, elle a été intégralement rasée par le Dixie Fire. Ne reste ça et là que quelques pignons de maison qui tienne avec de rares étais. Après un rapide déjeuner sur Chester, on décide d’aller vers SusanVille en stop. Le début ne se déroule pas trop mal. Un premier véhicule nous amène à l’intersection que nous avons choisie, sauf qu’après une heure d’attente, il n’y a pas eu une seule voiture vers le nord ! Du coup, on retente une marche encore plus à l’est vers un lieu qui nous semble plus adapté. Hélène sollicite une ambulance de paramédicaux et elle nous dépose, au carrefour suivant. Effectivement le passage est conséquent. Malgré le trafic, il nous faudra patienter 5 h jusqu’à l’arrivée providentielle d’Oleg et de son truck monstrueux. Il va faire un détour pour nous amener à 2 miles de notre destination. Un vrai miracle, nous étions au bord de la crise de nerfs. Véhicule après véhicule, c’est échec sur échec, sachant qu’une voiture sur deux était… vide. Au bout du compte, c’est fait, mais quelle galère! Enfin, nous récupérons les clés de notre chambre au Gordon Rim Rock Café d’Old Station et pouvons enfin souffler. Keep going J98 J97 Au départ vers La Porte Road J97 Le plus beau des transports du PCT ! J97 Vive les ambulances ! J97 Merci Oleg J97 L’impressionnant truck d’Oleg One step back Californie du Nord One step forward