
37 km 1100D+ 1300D- durée 12 h 00
Une des plus belles journées sur la piste en Oregon.
Nous ne sommes pas les premiers à nous réveiller et à quitter le camp. Nous sommes maintenant tous devenus des machines et se lever tôt est presque une évidence pour tous les randonneurs. Il n’y a que des avantages à cette façon de vivre le chemin.
Pour commencer, les kilomètres parcourus sont, comme le dit régulièrement Régis, gratuits. Les corps reposés de la nuit ne sont plus douloureux, et le pas est facile. La faune, la flore sont aussi présentes et la nature se pare de ses plus belles couleurs. Enfin, psychologiquement, savoir à midi que nous avez marché plus des deux tiers de l’étape permet de pouvoir prendre des pauses si nécessité dans l’après-midi.
Nous commençons en forêt, et apprécions de voir ré apparaître les géants que nous avons côtoyés il y a maintenant plus de quinze jours. Les pentes à notre gauche qui file du mont volcanique Jefferson sont impressionnantes. Il ne s’agirait pas de tomber, car nous descendrions bien bas. Les premiers kilomètres sont enchanteurs. Nous passons régulièrement dans des clairières en fleurs, avec des couleurs rouges, jaunes, bleues, orange, blanches, violettes. C’est un kaléidoscope fou. Le sommet du Jefferson derrière lequel se lève le soleil ajoute à la grandeur du lieu. Nous avons envie de nous arrêter pour profiter des alpages, mais restons raisonnables, car l’étape est encore longue ce jour.
Malheureusement, à partir du sixième kilomètre, nous retrouvons les zones de forêts carbonisées sur pied. Les arbres blancs, sans vie redeviennent nos compagnons d’avancée, et gâche le plaisir d’être ici. Sur la carte topographique, les surfaces détruites sont immenses. Après le premier feu, White fire de 2017, la végétation à repoussée partiellement et de jeunes pins sont omniprésents.
Par contre la persistance des troncs morts, encore sur pied rappel que l’endroit a été bien brûlé et la progression de blow down (nom du widow maker quand il est au sol et que le randonneur le franchi) en saut de haies est fatigante. Brutalement, au 10 kilomètres, nous entrons dans l’immense mega feu de 2020. Le Lionshead fire a brûlé plus de 400 000 hectares. C’est invraisemblable et dantesque, le feu a détruit des zones qui avaient déjà été consumées trois ans auparavant. Les hikers, nous inclus, passons et essayons de ne plus trop regarder. On finit par s’habituer, et on fait abstraction de la désolation environnante.
Sauf, qu’on ne peut ignorer que l’Oregon brûle de nouveau et que cette année c’est pire que tout. À date de fin juillet, les surfaces incendiées sont déjà cinq fois plus importantes que lors de la plus mauvaise année connue. C’est réellement impressionnant, d’autant que la situation est également dramatique en Californie, où un nouveau feu, le Park Fire à l’ouest du Lac Alamno (J97) est toujours hors de contrôle. Il en est de même au Canada où le parc National de Jasper vient de vivre sa pire catastrophe avec la destruction d’une partie de la ville de Jasper. Certains ont beau se voiler la face, les changements climatiques sont à l’œuvre et l’urgence d’une prise de conscience collective est plus que nécessaire.
Nous, nous profitons des forêts encore existantes en faisant le tour du mont Jefferson. De temps en temps, des portions de quelques mètres ont survécu. Nous apprécions. Le mont Jefferson ressemble aux montagnes que nous connaissons dans les Alpes européennes. Pentes raides, pics rocheux et, cerise sur le gâteau, un vrai glacier en face nord, le premier que nous voyons sur un sommet aux USA.
Nous avons par ailleurs, la chance d’assister pour la deuxième fois à une éclosion de fonte de printemps, le chemin oscillant entre 1400 et 1600 mètres. Particulièrement importante cette année en Oregon, la présence tardive de la neige nous offre un festival de couleurs, et de parterres de fleurs odorantes. Les photos font peu honneur à l’ambiance très alpestre. C’est une des portions qui se rapproche le plus de ce que nous connaissons des Alpes.
Au nord du Jefferson, nous franchissons Park Butte après une belle ascension de plus de 700 mètres de dénivelé. Magique, en descente en face nord, nous retrouvons des névés. Nous revoilà comme des gamins à courir et à glisser en ramasse sur le dernier obstacle glacé de tout notre PCT.
Sympathique et inattendu.
Nous passons rapidement au pied de Ruddy Hill, Campbell Butte, Double Peak, Twin Peaks et arrivons enfin à notre campement du soir. Incroyable, nous rattrapons Hélène et Clément que nous avions perdu de vue depuis 4 jours. Ils avaient accéléré pour finir la section Oregon pour que Clément puisse prendre son avion dans les temps. Sauf que Clément s’est blessé et est obligé de ralentir. Nous proposons à Hélène quand elle sera de nouveau solo de se joindre à nous si elle le souhaite.
Le site de campement d’Olalie Lake, qui a été sauvé de la destruction du Lionshead est vraiment à conseiller. C’est un havre de verdure dans un désert de cendres et de troncs calcinés ressemblant à des allumettes géantes.
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