J39 Le PCT en fleurs

33 km 1850D+ 1700 D- durée 8 h 30

Quelle nuit !

La première partie a été plutôt tranquille, malgré un vent fort omniprésent. Celui-ci souffle toujours plein Ouest et les tentes sont bien protégées par les buissons. Étonnamment, ils sont suffisamment denses et sont des brise-vent redoutables. Même si les températures chutent rapidement, au alentour de zéro degré, nous ne sommes pas inconfortables, tant s’en faut.

Sauf que, à partir de 2 h 00 du matin, changement de programme. Eole passe au nord, et nous nous retrouvons exposés à son courroux dans les pentes basses des monts Tehachepi. Par chance nous avons orienté la tente dans le bon axe et il va, juste une fois sur une bourrasque isolée, plaquer la toile au sol. Heureusement les arceaux en carbone tiennent bon. Par contre, la sortie en culotte pour fixer les piquets et retendre les haubans est mémorable. Ambiance garantie, surtout avec le grésil qui fouette les jambes. Post Card fait de même, puis Régis quelques minutes plus tard.

Au matin, nous nous réveillons dans le froid et la neige à nouveau. Le vent à encore forci et Régis voit celui-ci s’engouffrer brutalement à l’intérieur de son abri. Une des accroches de la toile extérieure cède. Celui-ci va plier ses affaires en un temps record. Moins de 5 minutes ! Chapeau l’artiste. 

Janet de son côté a bien dormi, mais file rapidement sur le chemin en sa compagnie, car elle se refroidit vite. Quant à PostCard, il décide de rester et attendre des conditions meilleures. Nous ne le reverrons plus du PCT.

Normalement c’est canicule dans la zone où nous sommes. Pour l’instant notre PCT est sous le signe de la neige, certes en faible quantité, mais bien tardive pour la saison.

Nous enfilons tous nos vêtements chauds, déjeunons rapidement et commençons notre randonnée dans une ambiance cataclysmique. Le vent est vraiment fort, et la poudreuse a blanchi les collines. Des nuages gris sont accrochés sur tous les sommets environnants. Le climat est à la tempête.

L’ascension des collines du nord Mojave est magnifique. Les nouveaux points de vue sur le désert sont extraordinaires. Des accumulations de neige alternent avec le sable du sol dénudé, créant des dégradés pastels uniques. Dans les montagnes, les floraisons viennent de commencer, et la fine couche blanche qui recouvre les fleurs est superbe. C’est un patchwork ininterrompu de jaunes, violets, roses, et mauves.

Après deux heures de montée, nous entrons dans les monts Tehachepi, et longeons le canyon de TylerHorse Wash. Plusieurs espaces de campement sont présents et nous pouvons nous ravitailler en eau. Certains randonneurs ont dormi ici, mais l’endroit n’est pas plus protégé des vents déchaînés. Pas de regret d’être resté plus bas. 

Nous franchissons plusieurs canyons secs. Au douzième kilomètre nous traversons Gamble Spring canyon. Après celui-ci la montée est tonique, sur cinq cents mètres de dénivelé. Sur la berge en face de nous, nous devinons Régis et Janet, en avance sur nous d’une trentaine de minutes. Nous prenons le temps de faire la pause du repas de midi à mi-montée, en présence de Régis que nous avons rattrapé. Nous ne nous éternisons pas, car les températures sont vraiment froides et le vent ne nous permet pas de profiter du lieu. La vue est pourtant la plus belle qui soit sur le Mojave en contre bas. Nous regardons plein Ouest en direction de Soledad Mountain. Nous devinons la mine d’or et d’argent qui la raye. Les bourrasques soulèvent un rempart de sable jaune qui voile l’horizon. Les conditions sont décidément peu accueillantes. Au loin on aperçoit la base militaire d’Edward, lieu mythique où a été franchi le mur du son pour la première fois.

Nous restons ensuite un long moment sur une crête évasée et atteignons le point haut de notre étape à 1900 mètres d’altitude. Cela fait vingt kilomètres que nous marchons et nous n’avons toujours pas enlevé nos affaires pour temps froid. Un comble dans cet immense désert. Nous devrions arriver vite au lieu de campement que nous avons repéré sur le topo. Effectivement, après 5 kilomètres en descente, après une pause improbable dans un espace aménagé par un trail angel au bord du chemin, table de pique-nique et chaises pliantes pour tout le monde, nous y sommes.

Sauf que l’endroit est inexistant, et en plein vent. Il ne sera pas possible de dormir ici. De surcroît, il n’y a pas d’eau ! Après une discussion rapide, Janet, Régis, Hélène et moi décidons de continuer. Du coup, les 25 km se transforment en 33, et surtout nous ajoutons une quantité importante de dénivelés négatifs à notre étape alors que nous en avons déjà beaucoup dans les jambes.

Nous serons en ville ce soir. Ceci compense cela. Étonnamment, en dehors de douleurs aux talons cela se fera plutôt aisément. Au final, nous marchons plus de 20 miles et arrivons enfin à Tehachepi Pass.

Au croisement du PCT et de Tehachepi Willow Spring Road, nous découvrons une cachette avec des sodas et une liste de téléphone. Des trails angels proposent de venir nous chercher. Effectivement, après une canette, deux appels, et vingt minutes d’attente, nous voilà à quatre en route vers la ville. Merci à eux, car sans leurs aides, le chemin serait beaucoup plus compliqué.

À Tehachepi nous dormons chez des trails angels improvisés. Janet, l’Américaine qui est avec nous, a eu une offre qui diffère de l’accoutumée. La fille d’une Trail Angel qu’elle a croisée il y a 15 jours est d’accord pour nous héberger. Quand nous arrivons, nous découvrons que Jana, que nous avions perdue de vue depuis un mois, est aussi présente. L’accueil est magique et sans commune mesure avec l’ordinaire. Nous dormirons dans un grand lit, dans une vraie maison. Le bonheur.

Demain ce sera zero day et profiterons un maximum de la ville de Tehachepi.

Go to Canada.

J40

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