
32 km 400 D+ 200 D- durée 8 h 00
Quatre heures, le bruit désagréable du réveil rompt notre sommeil.
Nous voilà tous à déjeuner rapidement et à ranger nos affaires. Ce n’est pas compliqué, mais tous ensemble dans une petite chambre c’est épique. Nous sommes surtout vigilants à ne rien oublier.
Le taxi est bien à l’heure et 30 minutes plus tard nous entassons nos sacs à dos dans le coffre d’un chauffeur estomaqué de voir quatre hurluberlus partir, avec presque rien dans le désert. Certains Américains n’ont jamais entendu parler du PCT et pour eux nous passons pour des doux dingues.
Nous retrouvons le PCT à 5 h 00 et Janet est bien présente. Cool, voilà la Tramily (Trail Family) prête à se lancer dans ce qui, certaines années, est une des étapes difficiles, du fait de l’absence d’eau et d’ombres sur quarante kilomètres. Nous démarrons à la frontale. L’ambiance est féerique et nous marchons plein Est. Le lever de soleil est rapide et nous sentons que l’endroit est propice à une cuisson lente. Sauf que… nous bénéficions d’une chance incroyable. Le vent refroidit l’air et les nuages couvrent celui-ci à intervalles réguliers.
Du coup, ce qui devait être un sacerdoce, se révèle être une randonnée tranquille, certes longue sur un terrain plat, mais totalement aisée et agréable. Les couleurs sont tel que rêvées, au bleu sombre de la nuit succède en vagues ininterrompues toutes les nuances de l’aube. Les rouges, orange, roses, jaunes, alternent et se reflètent dans l’eau du canal que nous rejoignons dès le premier kilomètre. Nous sommes tous à apprécier ce moment tant attendu. Cette section du PCT est mythique, et l’image d’Épinal du randonneur sur l’immense tuyau noir mât et rond de l’aqueduc est classique, omniprésente dans les blogs, sites, reportages photographiques.
6 h 00 du matin, nous y sommes.
Surprise ! Il n’est long que de trois kilomètres. A peine vingt minutes plus tard nous quittons celui-ci pour marcher sur un canal recouvert d’un revêtement en béton. Pour avancer, c’est facile, mais c’est tout sauf passionnant. En fait, la section ne se résume pas à ce bout de tuyau, certes graphique, mais bien moins joli que les portions suivantes.
Au dix huitième kilomètres le PCT bifurque en un immense virage à gauche, plein nord vers les montagnes de Tehachepi. Les vues sur le désert sont magnifiques, et les Joshua trees omniprésents. Nous devinons, çà et là, des espaces aménagés sous les arbustes, refuge sommaire pour les futurs marcheur quand ce sera la fournaise. La piste est large, de temps en temps passe un véhicule, en un désagréable nuage de poussière. Des gens habitent ici. Cela semble inconcevable. À perte de vue ce n’est que buissons raz, terres rougeâtres, avec éparse, une pelouse de petite taille qui égaie à peine la plaine. L’herbe jaunie déjà, alors que le printemps vient juste de commencer. Nous croisons des locaux, et en discutant avec eux, nous apprenons que le lieu n’a plus été vert et fleuri ainsi depuis 1986.
Pour nous le désert est simplement… désertique ! Faute de références, on a du mal à mesurer notre chance.
Au kilomètre vingt-deux, nous rejoignons une « wind farm », immense parc à l’américaine, avec des milliers d’éoliennes de toutes tailles. Le bruit de la rotation des pâles est permanent et assourdissant par moment. C’est impressionnant et à la limite du pénible. Le corridor de la plaine de Kern et de la vallée d’Antilope est propice à l’installation de celles-ci, peu d’habitants, et couloir géographique orienté Ouest Est, dans le sens des vents dominants. C’est idéal et la région exploite cette ressource depuis les années 1960. C’est tout le paradoxe des USA, à la fois fervent défenseur d’une consommation carbonée pathologique et précurseur d’une protection de l’environnement. À ces installations gigantesques ont été ajoutés des panneaux solaires, encore plus démesurés. L’ambiance est indescriptible.
Vers 15 h 00, nous décidons de nous arrêter. Les vents sont devenus permanents et il nous faut absolument trouver un endroit abrité. Nous réussissons à dénicher dans Cottonwood Creek, caché derrière les rares arbustes présents, trois espaces permettant de monter nos tentes. C’est un des seuls emplacements corrects que nous ayons vu depuis plusieurs kilomètres. La nuit va être collector, en espérant que les vents ne tournent pas. Nous aurions pu marcher plus longtemps, mais le prochain site de campement est à encore 18 kilomètres, et nous n’avons pas envie de faire cinquante kilomètres aujourd’hui. Nous sommes debout depuis plus de 10 h 00.
Demain nous nous lèverons tôt. Il faut profiter des conditions idéales du trail pour franchir ces collines arides. Il nous tarde aussi d’arriver pour vraiment laver nos affaires et enfin nous reposer.
Keep going
