22 km D+ 500 D-600 durée 5 h 30
Nous nous réveillons fatigués ce matin.
Une nuit avec un animal qui tourne autour de votre couchage jusqu’à 3 h 00 est tout sauf reposante.
La soirée a été rock’n’roll. À 23 h 00, nous avons été sortis de nos duvets par nos voisins, criant des « Bear, get out! ». Un ours est dans le camp, en train de voler les sacs à dos d’une première tente. Son propriétaire, hiker californien, visiblement connaisseur de la faune locale repousse rapidement la bête. Une dizaine de minutes plus tard, le voilà de nouveau à côté de deux autres tentes. Il réussit à prendre un sac, et commence à macher une bouteille. De l’eau sucrée avait été mise les jours précédents dans la gourde et l’ours avec son flair de compétition l’a senti. Imaginez la frayeur de nos voisins se réveillant à 23 h 00 avec un tas de poils noirs de 250 kg assis sur la table de pique-nique en bois à moins d’un mètre d’eux, en train de détruire vos biens. Moment collector !
Nous voici à les observer en train d’essayer de faire fuir cet hôte encombrant. Le concert de casserole à 23 h 30 est épique ! Nous découvrons que les gamelles et cuillères métalliques produisent des sons désagréables et font décamper la faune locale. C’est un des outils « anti ours noir » classiques. Dans les faits, cela durera quand même plus de 30 minutes.
Heureusement, nous avions été prévenus par les commentaires des autres randonneurs. Nous avions anticipé et fait du « Bear hanging ». Nos sacs de nourriture suspendus dans l’arbre ont été protégés. Bien nous en a pris.
Par contre nous sommes déçus par l’attitude de cowboy du Ranger, la veille, qui a nos yeux n’a pas été professionnelle. Ces commentaires ont été mal avisés, condescendants et visiblement il nous a considérés comme des benêts de Français. « There are no bears here. It’s fake news! » Et bien nous avons eu droit à la visite de la fake news !
Addendum : l’ours sera malheureusement tué deux mois plus tard, celui-ci étant devenu agressif. Les rangers ont trop différé la mise en œuvre des boîtes métalliques de protection.
Aujourd’hui, nous devrions arriver à Cajon Jonction. Le PCT croise un Mc Donalds au milieu d’une zone désertique. C’est un lieu classique de pause. Nous partons vers 8 h 30 et retrouvons rapidement le chemin. Nous évoluons toujours parmi les mêmes collines semi-arides le long de Cleghorn mountain, puis de Little Horsethief canyon. La faune est peu présente, sauf des grillons, qui font leurs apparitions sonores. On se croirait vraiment dans le sud de la France. Après une dernière ascension, et quelques serpents quotidiens, nous franchissons un col sans nom qui surplombe une falaise ocre, tas de sable gigantesque avec vue sur le mont Baden Powell, notre prochaine étape, dans trois jours. Le panorama est spectaculaire. Les sommets sont dans une brume qui crée des dégradés de teintes qu’il est difficile de décrire, mélange de blancs, de verts, aux reflets moirés, changeant au gré des vents et des montées et descentes du PCT.
L’arrivée à Cajon Jonction est un autre choc visuel, mais aussi olfactif et auditif.
C’est moche, bruyant, puant. L’autoroute est à l’américaine. C’est une immense saignée de bitume et de bétons, sur lequel passent huit voies, saturées de véhicules en un vacarme assourdissant. Des trains gigantesques de plusieurs kilomètres de long ajoutent à cette vision une touche supplémentaire au cauchemar sonore, ceux-ci klaxonnant à chaque croisement de piste en terre.
Nous filons au Mc Donald’s. La nourriture est atroce, grasse, mal cuite. Ce sera assurément dans le top trois des pires restaurants.
Nous faisons, après la pause, venir un Uber et partons vers Wrighwood. L’arrivée dans le village sera compliquée. L’ensemble des hôtels est réservé et nous réussissons par miracle vers 19 h 00 à trouver une possibilité de camping dans le jardin d’un des habitants. Un trail magique de la dernière chance !!
Le moral en ferait presque une descente rapide. Pas simple ce PCT, qui alterne entre lieux idylliques et moches en quelques kilomètres, mais aussi entre moments faciles et ardus . La fatigue doit sûrement y être pour quelque chose. Cela fait 24 jours que nous n’avons pas fait de vraie pause.
Demain c’est « zero days ». Enfin.